Ce ne sont pas les plaisirs qui sont malfaisants, mais seulement la rareté des plaisirs, d’où naît l’excès. Charles Fourier Empruntant son titre à un ouvrage de Charles Fourier (1772- 1837), « Le Nouveau Monde industriel » est à la fois la présentation d’une nouvelle génération d’artistes émergente en France, un projet basé sur le passé industriel des Moulins, et une exposition explorant l’histoire et le potentiel de l’utopie fouriériste.

Comprenant les œuvres de 21 jeunes artistes, l’exposition se développe dans la halle sous la forme d’un phalanstère, le modèle de communauté harmonieuse et universelle inventée par Fourier — qui devait selon lui constituer le socle d’un nouvel Etat.

À la fois architecture – une sorte d’exploitation agricole avec des bâtisses pour le logement et le divertissement – le phalanstère est également une organisation dans laquelle la production des biens matériels, tout comme celle d’une nouvelle société, s’établit en fonction des penchants et des qualités de chacun — tout comme se construit une exposition collective. L’existence d’intérêts croisés permet une répartition équitable entre l’intérêt individuel et l’intérêt collectif. Par sa réflexion sur l’organisation du travail, sur les relations entre les sexes, entre l’individu et la société, Fourier apparaît comme un précurseur du socialisme et du féminisme français. Si, de son vivant, 2/ peu de gens répondirent à ses appels au mécénat, les phalanstères ont fait l’objet de tentatives d’application nombreuses en France et aux États-Unis au XIXe siècle.

Le plus célèbre fut le familistère de Guise, créé par Godin sur des plans qu’il avait établis lui-même, et qui conserva sa fonction à l’identique jusqu’en 1968. Dans ce contexte historique et philosophique, les artistes proposent des oeuvres, des installations, des méthodes de travail, des relations… dialoguant avec les idées de Fourier.

Certaines les illustrent (Vivien Roubaud, Enzo Mianes), d’autres au contraire en soulignent la dimension chimérique, voire en donnent une vision totalement dystopique (Raphaël Fabre). Certains éclairent du prisme fouriériste notre société contemporaine pour en révéler de manière acerbe les absurdités ou la violence (Mathilde Ganancia, Bianca Argimon). À l’image du phalanstère, l’exposition comportera un volet statique – un accrochage dans un espace – mais également un volet dynamique, activé par le travail de la communauté artistique née à Boissy. Ainsi à l’occasion de la conférence de presse qui se tiendra le 25 septembre au Consulat à Paris (qui est, en écho avec le projet, un espace de co-working et de coopérations multi-directionnelles) une programmation musicale et performative élaborée en collaboration avec les artistes marquera le lancement du projet.

Telle un teaser, elle annoncera le festival qui se déroulera aux Moulins en 2017, également imaginé avec les artistes. En alliant travail et vie affective, expérience sociale et divertissement, le « Nouveau monde industriel » s’approche au plus près de la pensée fouriériste. Résolument hybride à l’image du projet, le film documentaire de Mathilde Supe offrira un témoignage de cette tentative d’activation de la quête de Charles Fourier.