Pour sa première exposition personnelle à la galerie Valentin, l'artiste néerlandais Folkert de Jong propose une installation inédite constituée d'oeuvres récemment exécutées et dévoilées pour l'occasion.

Le parcours s'ouvre sur 10 tableaux, en référence aux commandements bibliques, et se poursuit par trois sculptures articulées, sortes de pantomime de Jésus crucifié sans croix, et animées comme de vulgaires automates de fête foraine, sans qu'aucun rire d'enfant ne vienne couvrir le bruit de la mécanique.

Loin d'être un hymne à la religion, cette exposition, rien que par son titre «Wormwood» («l'absinthe» l'alcool qui rend fou) introduit une notion bien plus apocalyptique. En dehors d'être le nom de cet élixir dangereux, le titre fait référence à la fois à un disque du groupe «The residents», représentant d'un underground américain des plus brillants mais aussi à l'étoile qui porte ce nom dans le livre de l'apocalypse et qui s'abat sur la terre pour empoisonner les eaux. Le titre ramène ainsi l'exposition dans la part noire du religieux, et dans le giron de l'art d'avant garde, de résistance, qui s'oppose souvent à la marchandisation de l'art.

Comme à son habitude, Folkert utilise des sources historiques mais pour mieux les manipuler dans une histoire politique contemporaine. La manipulation est aussi bien formelle - on passe d'une statue en bois sculptés achetée en Ecosse, à un moulage en mousse polyuréthane - que symbolique, après être passés entre les mains de l'artiste les christs ressemblent plus à des épouvantails à tendance gothique sortis d'un concert d'Alice Cooper.

Les dix commandements, règles dogmatiques qui devaient permettre de régir la société dans une certaine harmonie Humaine, ont plus servi à justifier des guerres et des destructions. Cela n'est pas sans nous rappeler les textes brandis aujourd'hui par certains pour justifier de leurs actes de barbaries.

La figure du Christ est utilisée comme un référent culturel à l'histoire de l'art, à l'histoire de l'humanité, et à l'histoire personnelle de l'artiste.

Cette statuaire a d'ailleurs symbolisé, pendant des siècles, le lien entre l'homme et dieu. Aujourd'hui, il y a une désacralisation de l'objet religieux transitionnel, au profit d'autres objets comme notre téléphone portable.... Est-ce différent? A travers cela, Folkert évoque peut être l'absence croissante du spirituel dans nos sociétés au profit d'un pur matérialisme.

Tel un nécromancien, Folkert de Jong a réanimé la sculpture du Christ, sans lui rendre vie pour autant, car Folkert n'est pas Dieu, il n'est qu'un artiste contemporain.

Jésus s'agite donc, nous fait signe un peu désespérément....Que cherche t-il à nous dire? A nous faire comprendre? En tout cas un malaise plane devant ces géants aux cheveux longs ébène. Une nouvelle fois avec cette mise en scène provocante, dérangeante, titillante, Folkert essaye de capter l'attention du spectateur tel un film hollywoodien à gros budget.... Il ne fait pas du cinéma (au sens d'un caprice), il cherche réellement à attraper le spectateur dans son filet pour que celui ci ne puisse pas s'échapper sans garder une image intense de l'expérience qu'il vient de vivre.

«Wormwood» ou la tentation du cosmocide, menace ou prise de conscience de ce qui se joue actuellement dans le monde....