Fin juin de cette année, l’album en commun entre Jay Z et Kanye West devient le projet collaboratif le plus streamé de la plateforme Spotify avec un total de 2,4 milliards d’écoutes, 12 ans après sa sortie. Retour sur un succès qui a bouleversé l’histoire du rap américain et mondial. Avant de s’associer pour cet album, les deux se connaissent très bien, Kanye West produit des morceaux pour Jay Z depuis 1998. C’est en quelque sorte, le natif de Brooklyn qui a lancé la carrière de Kanye West, car ce dernier devient compositeur attitré des artistes du label New Yorkais, Roc-a-Fella (Crée par Jay Z et Damon Dash). Ce n’est qu’à partir de 2004, que l’artiste de Chicago devient rappeur en dévoilant son premier album, College Dropout.

Lorsqu’ils décident de réunir leurs forces pour créer ce projet, les deux artistes sont à leur prime. Jay Z est le plus grand rappeur de la dernière décennie et devient un businessman hors pair, et Kanye West est un rappeur et producteur de talent que toute l’industrie musicale américaine s’arrache. Ils restent chacun sur des succès, le New Yorkais avec son album « Blueprint 3 » (dernier de sa trilogie) et le Chicagoen avec le projet « My Beautiful Dark Twisted Fantasy » et sa pochette controversée. C’est à partir de fin août 2010 que le projet prend origine lorsque Kanye West l’annonce son compte Twitter. Initialement, ce disque ne devait être qu’un simple « EP » (mot anglais, sigle de extended play « durée étendue ») contenant seulement quelques titres.

Les sessions d’enregistrement de l’album se déroulent à différents endroits dans le monde, dont le célèbre studio « Real World Studios » dans le Wiltshire en Angleterre, ou encore dans une chambre du Palace Le Meurice, au cœur de Paris. Tout le projet est pensé et dessiné, les pochettes et l’artwork sont créées par le designer italien Riccardo Tisci, qui à l’époque était directeur artistique de la maison Givenchy.

Rarement, un album avait suscité autant d’attente. Pour faire augmenter cet intérêt autour de ce projet, les deux artistes effectuent peu de promotion. Ils invitent seulement quelques journalistes et fans au Mercer Hotel de New York pour une séance d’écoute exclusive ainsi qu’une présentation des pochettes (album et singles), le 7 juillet 2011, un mois avant sa sortie officielle.

Lorsque l’album sort le 8 août 2011, le succès est immédiat, le disque se vend à 460 000 exemplaires en première semaine. Il est salué par la critique pour son avant-gardisme et son éclectisme. Les deux rappeurs ont exploré des sonorités diverses (Sample de Cassius et d’Otis Redding par exemple) sur les thématiques du luxe, de l’opulence, du pouvoir et surtout de l’ego-trip. Son casting est dantesque tant au niveau des featurings (Beyonce, Franck Ocean, Mr Hudson) et des productions (Mike Dean, Hit-Boy, The Neptunes, Swizz Beatz et Kanye West lui-même). Même Bruno Mars est présent sur le projet en tant qu’auteur. Les clips qui sortent font preuve d’originalité comme « Otis » avec une Maybach customisé à 400 000$ et un énorme drapeau américain ou encore « No Church in the Wild », réalisé par le français, Romain Gavras, montrant une émeute sans la présence des deux artistes. En 2012, les deux mastodontes ont réalisé une tournée mondiale de plus de 80 dates à guichets fermés, tout simplement hors-norme.

Jamais un album collaboratif de deux artistes majeurs n’avait eu autant de succès et d’influence. Par la suite, peu de gros noms du rap se sont essayés à l’exercice. Depuis la sortie de Watch the Throne, seulement Drake et Future en 2015, avec What a Time to Be Alive et Travis Scott et Quavo en 2018 avec Huncho Jack. Ces deux albums n’ont jamais eu l’aura du projet de Jay Z et Kanye West.

À l’époque, peu de journalistes ou de critiques parlent de l’influence de ce disque sur un courant musical qui se faisait de la place petit à petit dans l’univers du rap à ce moment-là, la Trap. Connu également sous le nom de « Trap Music », c’est un courant qui vient de la ville d’Atlanta. Elle est issue du Dirty South. Le style de cette musique se caractérise par de lourd orchestre, synthétiseur et surtout de kick de la boite à rythme Roland TR-808. Sur Watch The Throne, dans les titres bonus du projet, « H.A.M » (présenté comme 1er single) et « Illest Mothef*cker Alive », Kanye West a fait appel aux jeunes beatmakers, Lex Luger et Southside qui commençaient à se faire un nom depuis un plus d’un an, pour composer ces titres. Les résultats détonnent car c’est un mélange des rythmes novateurs des compositeurs d’Atlanta avec la création mélodique et ingénieuse de Kanye West. Indirectement, l’artiste de Chicago a fait passer la Trap dans une dimension. Le courant qui était essentiellement Underground, destiné à être écouté dans la rue, commençait à passer en radio grâce à des sonorités plus populaires. De nouveaux producteurs sont venus avec cette Trap plus moderne, comme Metro Boomin et Mike Will Made-it. Watch The Throne a eu un impact conséquent sur tout un mouvement qui perdure encore de nos jours.

Aujourd’hui, l’album doré peut être rangé dans la catégorie des classiques étant donné que c’est un projet qui a laissé une marque indélébile sur tout une culture ainsi que sur de nombreux artistes ont été influencés par ce disque. Watch The Throne est un album iconique puisque c’est tout simplement un chef d’œuvre.

Kanye West & Jay-Z - Watch The Throne 2 (Full Album)

Notes

How ‘Watch The Throne’ Still Impacts Hip-Hop.
Comment “Watch The Throne” de Kanye West et JAY-Z a changé la face du hip-hop.
How Watch the Throne changed music.
Watch the Throne.