Du 4 mars au 9 mai 2015, la Galerie des Galeries invite la peintre Karina Bisch à s’emparer de son espace. Inspirée par le modernisme, dotée d’un grand sens de la couleur, sensible à l’histoire des arts appliqués, l’artiste a développé depuis les années 2000 une peinture graphique envoûtante qui ne cesse d’interroger l’origine et l’usage des formes.

Pour cette exposition qu’elle nomme Arlequine, Karina Bisch décide de présenter des oeuvres récentes qu’elle donne à voir dans un dispositif inédit. L’ensemble des murs de l’espace sera recouvert d’une toile de 70 mètres de long peinte de motifs en noir et blanc qui plongera le spectateur dans un univers total. Des fenêtres créées dans la toile laisseront apparaître des peintures en couleur. Au milieu de l’espace, six personnages revêtus de tenues créées par l’artiste, tels des spectateurs, viennent activer l’exposition qui se transforme en un véritable théâtre.

Exposées en France, en Europe et aux états-Unis, les oeuvres de Karina Bisch se trouvent notamment dans les collections publiques du Musée d’Art moderne de la Ville de Paris ou du FRAC Aquitaine. Diplômée en 2000 de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris et résidente à la Rijksakademie van Beeldende Kunsten à Amsterdam en 2005 et 2006, Karina Bisch a développé un vocabulaire artistique usant de nombreuses références à l’art ainsi qu’à la mode ou à la danse : autant d’images qu’elle réinterprète en créant des combinaisons inattendues.

Portrait de Karina Bisch

Il y a d’abord chez Karina Bisch cette énergie de l’incarnation. Sa seule présence suffit à vous faire vivre un moment de l’histoire de l’art. Ses bijoux, ses tenues, son sens des combinaisons sont un hommage quotidien à ses amours modernes : Sonia Delaunay, encore et toujours mais aussi Ellsworth Kelly ou Pablo Picasso. Femme, artiste, peintre, femme d’artiste, Karina expérimente pleinement son oeuvre et sa vie d’auteur. à travers sa propre histoire, de son enfance en Côte d’Ivoire à ses voyages et rencontres, de ses recherches ou ses collections d’images, Karina a développé un dictionnaire des formes dans lequel elle pioche pour créer ses séries de peintures. Acrylique, pochoir, sur toile ou sur tenture, en volume ou à plat, sa peinture n’a pas de limite d’expression. En 2013, elle crée ainsi Painting for living, une série de peintures sur des carrés de soie à porter ou à accrocher : une marque est lancée, Karina développera deux collections par an. Est-on face à de la mode ou de l’art ? Chose est sûre, nous sommes face à une artiste qui s’amuse des genres et nous appâte avec des formes. C’est cette même Arlequine que nous retrouvons dans l’exposition qu’elle a conçue pour la Galerie des Galeries.

Karina se lance dans un projet pharaonique : recouvrir l’ensemble des murs de la galerie par une toile qu’elle aura entièrement peinte durant trois mois. Ce temps de la production artistique, cette implication, Karina les revendique : le fait main, l’expérimentation des matières et des techniques sont au coeur de son processus créatif.

Le titre Arlequine rappelle par ailleurs l’attrait de l’artiste pour les costumes et la mise en scène. Au milieu de l’espace, des mannequins, revêtus de tenues créées par l’artiste, portent chacun les prénoms de quelques figures des courants modernes du XXe siècle, Gustave, Varvara, Sonia, Giacomo, Pablo et Ellsworth. L’évocation de ces mouvements, du cubisme à l’orphisme en passant par le minimalisme, souligne l’intérêt de Karina pour la couleur et le motif. Ces deux attributs de sa peinture seront confrontés dans l’ensemble de l’exposition par notamment des mises en noir et blanc de travaux antérieurs. La conception et la construction de l’exposition Arlequine révèlent ce « lien pictural unificateur » si cher à l’artiste. Car Karina n’a qu’un seul but, poursuivre le projet moderne en intégrant l’art à tous les domaines de la vie.

Elsa Janssen, Directrice Galerie des Galeries