Du 4 juin au 19 juillet prochains, la Maison d’Art Bernard Anthonioz à Nogent-­sur-­Marne présente la première exposition personnelle en France de Bethan Huws, depuis sa révélation en 2011 au CIAP de Vassivière et au Frac Limousin. Autour de son film Zone, qui donne son titre à l’exposition, un ensemble d’oeuvres (film, sculptures, dessins, installations, croquis et notes) dialogue avec la quiétude et l’ambiance bucolique du parc de la Maison d’Art.

Vivant entre Berlin et Paris, Bethan Huws s’amuse de l’étrangeté de certaines connexions entre mots, concepts et images. Au travers des différents médiums qu’elle utilise, elle interroge de façon malicieuse le langage, ses jeux, ses matérialisations, ses mécanismes de construction, ses stratégies comme ses traductions. Mots voisins ou similaires, citations ou affirmations se trouvent transférés dans le champ de l’art pour appuyer les contradictions, les déplacements de sens ou les attentes éventuelles qu’ils suscitent. Les éléments textuels – comme dans sa série Vitrines mise en scčne dans un mobilier « administratif » – tendent à encourager les associations de pensées autour de l’importance de l’art et de sa relation à la vie męme. Interrogeant l’acte de communication de l’artiste avec le public, Bethan Huws se réfčre non seulement à la rencontre avec l’oeuvre d’art mais invite également à définir ce qui donne et constitue la valeur de l’oeuvre, entretenant une filiation directe avec la pensée de Marcel Duchamp.

L’influence de Duchamp et de son univers, dans lequel elle s’est immergée et qu’elle a exploré de façon approfondie et systématique, est manifeste dans l’exposition. Elle s’enrichit des croisements répétés avec la figure de Guillaume Apollinaire qui, comme Duchamp et elle, nourrissait une passion pour le calembour ou la contrepčterie. Les références à l’artiste et au počte sont réunies dans l’une des entrées du travail qu’elle a effectué entre 2007 et 2008, Research Notes, dans lequel elle met en exergue les relations entre leurs oeuvres et leurs textes à travers une installation regroupant dessins, notes manuscrites, collages, cartes postales, notices de dictionnaires et reproductions d’oeuvres.

C’est sous cette męme double influence que se place Zone, son film réalisé en 2013. Constitué à partir d’un počme d’Apollinaire, il est construit grâce à un collage de séquences « ready made » issues de films documentaires animaliers et met en oeuvre un double mouvement : de la récitation du počme vers l’image, de l’image vers le texte dit ; le film crée une structure parallčle et complémentaire qui évoque en filigrane le contenu et l’atmosphčre du počme sans pour autant l’illustrer.

Au-delà du rapport étroit à la question du langage et à l’inspiration de Duchamp et d’Apollinaire, Bethan Huws en appelle sans recours au spectaculaire ou à l’artifice, au regard du visiteur à l’oeuvre et à l’artiste et affirme, pour reprendre le titre de l’une de ses installations, que « les artistes interprčtent le monde et, ensuite nous interprétons les artistes ».

Bethan Huws est une artiste galloise née en 1961. Elle vit entre Berlin et Paris. Elle est représentée par la galerie Tschudi à Zuoz (Suisse).