Pierre et Gilles sont de retour à la galerie Templon avec Le temps imaginaire. Ode à la tolérance et à la liberté, l’exposition se déploie comme un parcours à travers l’univers des artistes dont la récente rétrospective (Bruxelles, Le Havre) a souligné toute la complexité.

L’univers de Pierre et Gilles, enchanteur mais hanté par l’actualité proche, joue avec un certain “esprit français” où la diversité, l’ouverture aux autres mais aussi la notion de résistance prennent une dimension à la fois grave et légère. Accueilli par une “Sentinelle” qui rappelle l’opération du même nom, le spectateur découvrira plus loin l’émouvante prière du soir d’un jeune musulman, un trio amoureux sur fond de Tour Eiffel évoquant l’esprit libre de Paris. Clin d’œil aux congés payés de 1936, un autoportrait de couple plein d’humour, avec les artistes en fans du PSG, participe à une vision dédramatisée du débat sur le port du voile. Dans une alcôve de la galerie, Pierre et Gilles rendent hommage au peintre Bernard Buffet, qui choisit de se suicider dignement plutôt que de renoncer à la peinture.

A l’écoute de toutes les manifestations du monde, le travail de Pierre et Gilles parle de la différence. « Rien, chez Pierre et Gilles n’est jamais univoque. Il n’y a pas une vérité mais d’innombrables possibles », rappelle Sophie Duplaix, conservatrice en chef des collections du Centre Pompidou, qui considère les artistes comme les « gardiens éclairés de valeurs universelles que ne viennent entraver ni les considérations morales ni les discriminations politiques ».

« Immédiatement reconnaissables, mais constamment insaisissables » (Michel Poivert) les œuvres de Pierre et Gilles, à la frontière entre histoire de l’art et imagerie vernaculaire, photographie et peinture, se jouent des catégories traditionnelles. En atelier, les artistes composent un décor illusionniste animé par un travail complexe de lumière et de cadrage. A cette première étape succède un travail précis de peinture directement sur la photographie tirée sur toile, dont le cadre original est conçu comme un prolongement. Si la plupart de leurs modèles sont des anonymes, on retrouve ici et là des visages familiers comme ceux de Isabelle Huppert, Dita Von Teese ou Jean-Paul Gaultier, mais la culture de la célébrité n’est pas ce qui intéresse les artistes. Metteurs en scène, ils sélectionnent leurs acteurs pour construire des histoires. Ils s’amusent à brouiller les pistes en mettant en scène un faux Gérard Depardieu ou Michael Jackson.

Mondialement reconnus, les artistes ont développé depuis 1976 une iconographie singulière. Leur travail a été consacré par de nombreuses expositions en institutions, notamment une rétrospective à la Maison Européenne de la Photographie en 1996, au New Museum de New York en 2000, au Museum of Contemporary Art de Shanghai en 2005 et au Jeu de Paume à Paris en 2007. En 2017 leur rétrospective Clair-Obscur, au Musée d’Ixelles (Bruxelles) puis au MuMa du Havre, a rencontré un succès public et critique spectaculaire.

Introduit par une préface de Charles Dantzig (écrivain, directeur de la revue internationale et de la collection Le Courage - Grasset), avec une nouvelle de l’écrivain Arthur Dreyfus, le catalogue de l’exposition publié par la Galerie Templon est disponible en librairie et à la galerie.