La galerie Xippas est heureuse de présenter une exposition de l’artiste brésilien Waltercio Caldas. Figure majeure de l’art contemporain en Amérique latine, il revient à Genève après plus de 20 ans – son œuvre ayant fait l’objet d’une exposition personnelle au Centre d’Art Contemporain en 1995 – avec un ensemble de sculptures réalisées au cours de ces dernières années.

Waltercio Caldas commence sa pratique artistique dans les années 1960, époque marquée par l’apparition du mouvement appelé « Néo-Concrétisme », dans lequel il s’inscrit. Les artistes « néo- concrets » rejettent une approche rationaliste de l’art, pour une vision davantage phénoménologique et moins scientifique de la pratique artistique. « Le minimum de matériau physique révèle le maximum d’énergie latente de l’espace ».

Voici comment Guy Brett, écrivain et curateur, qualifie le travail de Waltercio Caldas qui depuis plus de cinq décennies place au cœur de son œuvre le processus de la perception et les relations entre le regard et la réflexion. Il fait coexister des formes extrêmement pures, presque minimalistes mais d’une complexité conceptuelle rare. Ses sculptures aussi présentes qu’immatérielles, donnent à voir aussi bien des objets que l’espace entre ces objets mêmes.

Caldas pousse ainsi à l’extrême dans ses œuvres le paradoxe entre présence et absence, transparence et opacité. Ce paradoxe est renforcé par le jeu de miroirs, récurrent dans sa pratique. À nouveau, il s’agit de l’idée de la réflexion que l’artiste développe sans avoir recours au miroir même. En créant plusieurs plans où les lignes et les objets se substituent aux reflets les uns des autres, l’artiste crée un miroir en trois dimensions et matérialise l’idée de la réflexion, processus qu’il appelle « la déconstruction fonctionnelle du miroir » . Ainsi Caldas dépasse la dualité entre présence et absence, positif et négatif, et parvient à une fusion paradoxale et fragile entre réalité tangible et pensée.

Dans ce processus de construction du sens, le langage joue un rôle primordial. La relation entre les noms et les objets, entre ce que l’on voit et ce que l’on lit étant essentielle, le titre fait part intégrante de l’œuvre de Waltercio Caldas. Le langage introduit une nouvelle optique, celle de la lecture au sens propre, donnant en même temps une autre dimension aux mots – la présence physique, comme dans Not now (2014), où les mots et les tiges en acier forment un ensemble indissociable, se prêtant à un jeu de répétitions, de reflets et de transparence. A la fois poétique et conceptuel, le recours au langage permet également

à Caldas d’introduire des références à l’histoire de l’art. Les titres de ses sculptures invoquent souvent des noms d’artistes, comme Brancusi (2014) et permettent d’enclencher une réflexion sur l’œuvre d’art elle-même, sur la distance entre l’art et l’histoire de l’art.

D’une rare finesse visuelle et d’une grande économie de moyens, les sculptures de Waltercio Caldas invitent le spectateur à vivre sa propre expérience de lecture de l’œuvre entre appréhension immédiate et interprétation intellectuelle. Dans la lignée de la pensée d’Umberto Eco, qui avançait, il y a plus de cinquante ans dans L’Œuvre ouverte (1962), que le spectateur faisait désormais partie du processus de création d’une œuvre d’art, Caldas l’implique dans l’expérience de l’interprétation et ouvre une multitude de possibilités de sens. Ce qui importe dans l’approche de son travail, c’est le moment précis et énigmatique de la perception, qui révèle l’œuvre comme processus, en résonance avec la pensée phénoménologique, selon laquelle l’objet n’existe que dans le regard du spectateur.

Waltercio Caldas est né en 1946 à Rio de Janeiro, où il vit et travaille. La première exposition personnelle de Waltercio Caldas a eu lieu au Musée d’art moderne de Rio de Janeiro en 1973, alors qu’il n’avait que 27 ans. En 1990, il reçoit le Brasilia Art Award au Brasilia Museum of Art. Depuis, de nombreux musées et institutions lui ont consacré des expositions personnelles, parmi lesquels : la Kanaal Art Foudation à Kortrijk, Belgique (1991) ; le Stedelijk Museum, Schiedam, Pays-Bas (1992) ; le Centre d’Art Contemporain de Genève (1995) ; le Musée National des Beaux Arts à Rio de Janeiro, Brésil (2000) ; la Fondation Calouste Gulbenkian, Lisbonne, Portugal (2008) ; Le Blanton Museum of Art, Austin, Etats-Unis (2013-14) ; L’IAC – Institut d’Art Contemporain de Sao Paulo, Brésil (2015), entres autres. Il a représenté le Brésil à la 47ème Biennale de Venise en 1997 et a participé à la 52ème édition de la Biennale de Venise en 2007. Il a également participé à la documenta 9 de Kassel (1992) et à la 5ème Biennale de Mercosul (2005). Ses œuvres font partie des plus grandes collections à travers le monde : Centre Georges Pompidou (Paris, France), the Museum of Modern Art (New York, Etats-Unis), National Gallery of Art (Washington, Etats-Unis), le Musée d’art moderne de São Paulo et le Musée d’art moderne de Rio de Janeiro (Brésil), entre autres. Ses immenses installations publiques sont présentes dans de nombreux pays : Brésil, Uruguay, Espagne, Norvège et Allemagne.