La galerie Xippas a le plaisir de présenter Handmade, la nouvelle exposition personnelle de Vik Muniz. Jouant sur la dichotomie entre l’objet et sa représentation, dans cette nouvelle série Vik Muniz explore la nature de la perception, réinventant les possibilités de construction de l’image photographique.

Les œuvres « faites-main » comme le titre de l’exposition l’indique, sont issues d’un procédé hybride qui réunit des manipulations manuelles voire artisanales – notamment, peinture ou collage – et la photographie numérique de haute résolution. En résultent des compositions complexes, chacune une œuvre unique, combinant des techniques différentes : le papier et le carton sont peints, découpés et superposés sur une surface, photographiée par la suite afin d’être manipulée, ré-agencée et photographiée à nouveau et ainsi de suite. En créant une multitude de plans qui laissent apparaître des éléments sous-jacents et leurs photographies, Vik Muniz invente de véritables trompes-l’œil où l’objet et sa représentation photographique sont entrelacés dans un jeu visuel.

Invitant le spectateur dans une quête de distinction entre l’objet et son image, l’artiste poursuit sa recherche sur les mécanismes de la perception, menée à travers toute son œuvre. Contrairement à ses séries antérieures, où les images de l’histoire de l’art ou de la mémoire collective étaient interprétées avec des matériaux insolites mais issus du quotidien, Handmade atteste du recours aux matières propres à l’art tels que le papier, le carton ou le métal. Ainsi, cette série renvoie-t-elle au principes fondamentaux de l’art abstrait : la couleur, la forme et le rythme servent ici d’éléments principaux de composition. A l’instar des toiles de Malevitch, les formes géométriques simples et les couleurs primaires créent une tension et une dynamique, ou encore les dédoublements des lignes et des éléments en aplats de couleur font ressortir le rythme vibrant qui pourrait faire écho aux compositions de Paul Klee ou à des partitions de la musique minimaliste avec ses infinies répétitions.

S’apparentant à l’abstraction géométrique ou à des tableaux cubistes, les œuvres de cette série jouent sur le volume et le décalage et transcendent non seulement symboliquement, mais littéralement les deux dimensions de l’image photographique pour renouer avec sa matérialité. L’artiste expérimente ainsi les supports de la photographie et emploie la technique d’impression sur aluminium afin de créer des compositions en trois dimensions où les couches de peinture superposées, les formes découpées dans le métal et les ombres portées se dupliquent et s’entremêlent, se confondant avec leurs images. Tels les bas-reliefs, ces œuvres en volume en contiennent une simulation, balançant entre le « vrai » et l’illusion, entre le réel et son double. La trace matérielle du geste artistique ainsi présent dans chaque œuvre, évoque le processus de création sans pour autant le dévoiler. Au contraire, celui-ci devient de plus en plus mystérieux au fur et au mesure que le regard se perd, incité à voyager à travers les multiples plans de l’image.

La construction de l’image invite ainsi le spectateur à sa déconstruction par le regard où la lisière de plus en plus poreuse entre l’objet et sa copie permet de révéler le mécanisme de notre manière de voir et d’appréhender l’image. A l’ère numérique où l’image se substitue de plus en plus à l’objet et sa manipulation devient partie intégrante du quotidien, la reproductibilité devient un des principes légitimes de la création. Comme dit l’artiste, « la différence entre l’œuvre et son image n’existe presque plus » et dans sa nouvelle série il livre une réflexion sur la notion fugitive de la réalité matérielle et ses interprétations possibles. L’objectif de l’illusion créée par Vik Muniz n’est donc pas de simplement déstabiliser notre perception, mais de nous « révéler l’architecture de notre concept de vérité ».

Vik Muniz est né en 1961 à São Paulo. Il vit et travaille entre Rio de Janeiro, Brésil et New York, Etats-Unis.

De nombreuses expositions personnelles internationales lui ont été consacrées, notamment par Chrysler Museum of Art, Norfolk, Virginia, Etats-Unis (jusqu’au 14 octobre 2018), Belvedere Museum, Vienne, Autriche (2018), Palazzo Cini, Venise, Italie, (2017); MARCO Museo de Arte Contemporáneo de Monterrey, Méxique (2017), High Museum, Atlanta, Etats-Unis (2016); Maurithuis, La Haye, Hollande, (2016), MUNTREF Contemporay Art Center, Buenos Aires, Argentine (2015); Tel Aviv Museum of Art, Israël, (2014), Les Rencontres d’Arles, France (2014); CAC Centro de Arte Contemporáneo de Málaga, Espagne (2012), MoMA PS1, New York, Etats-Unis (2007), Baltic Centre for Contemporary Art, Gateshead, Grande-Bretagne (2007), Miami Art Museum, Etats-Unis (2006), Pinacoteca do Estado de São Paulo, Brésil (2004), Fundación Telefónica, Madrid, Espagne (2004), Menil Collection, Houston, Etas-Unis (2002), Whitney Museum of American Art, New York, Etats-Unis (2001), Metropolitan Museum of Art, New York (1998) et International Center for Photography, New York (1998).

Son travail fait partie de prestigieuses collections privées et publiques, dont Museum of Modern Art, New York; Guggenheim Museum, New York; Metropolitan Museum of Art, New York; Los Angeles Museum of Contemporary Art, Los Angeles; Tate Gallery, Londres; Museum of Contemporary Art, Tokyo; Centre Georges Pompidou, Paris; Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, Madrid, entre autres.

En 2001, Vik Muniz a représenté le Brésil à la 49ème Biennale de Venise. Le travail de Vik Muniz est le sujet du film Waste Land (2010) qui a reçu une récompense au Festival de Sundance 2010 et a été nommé aux Oscars pour le meilleur documentaire en 2011. En 2011, Vik Muniz a été nommé Ambassadeur de Bonne Volonté de UNESCO. En 2015, il a fondé Morro do Vidigal, une école d’arts visuels pour les enfants du favela Vidigal à Rio de Janeiro.