La Galerie Xippas est heureuse de présenter Bodies’ Delays, une exposition collective des artistes Philippe Decrauzat et Pierre Paulin, avec la participation de Dan Walsh.

L’exposition Bodies’ Delays s’est construite autour du film Morceaux choisis tourné en 16 mm et co-réalisé par Philippe Decrauzat et Pierre Paulin. Dans chaque plan, une main gantée manipule l’une des copies de vêtements de la garde-robe de Pierre Paulin dans lesquels sont imprimés poèmes et essais. Entre déploiements de textes et gestes usuels — pliages, retournements, ouvertures de fermetures éclairs… —, ce film met en scène l’ambiguïté de gestes à cheval entre des manipulations d’habits et l’exhibition d’œuvres.

Les shapes canevas, Still (Time stands), présentées par Philippe Decrauzat jouent également d’une ambivalence. Dans son travail, il utilise aussi bien le film et la peinture que leurs histoires respectives. Cette nouvelle série de peintures s’inspire de dessins de croix de Malte — pièces mécaniques qui se trouvent dans les caméras et les projecteurs. Lorsqu’ils sont en rotation ces éléments techniques permettent d’entraîner la bobine tout en produisant des arrêts afin d’exposer ou de projeter une suite d’images fixes en flux continu. Ces peintures reprennent le dessin de ces pièces mécaniques à l’arrêt et à leurs surface sont perceptibles des tracés traités ton sur ton. Ces légères rémanences soulignent un décrochement résultant du passage de la forme des toiles aux variations de la peinture.

Ce décrochement existe aussi chez Pierre Paulin lorsque sa pratique d¬¬e l’art et de la poésie frôle celle du look vestimentaire. Dans son travail, le terme « look » renvoie à l’assemblage de basics — jean, trench, tee-shirt, hoody, boots militaires… — que l’on recombine pour produire un style vestimentaire. Pour lui, les vêtements sont comme les mots que l’on utilise pour écrire un poème : ils sont les éléments d’un langage issu d’une histoire culturelle commune que l’on agence pour créer de légères singularités. À ce titre, les œuvres de Pierre Paulin sont des variations autour de son écriture et de sa garde-robe. Pour cette exposition, il présente un ensemble de copies de ses vêtements dans lequels est publié son essai Ils glissèrent dans l’obscurité, des photographies d’une contorsionniste portant ces mêmes vêtements, ainsi qu’un livre en cuir blanc comprenant quatre textes à propos du look.

Dan Walsh est lui aussi présent dans l’exposition, avec un livre. Cette édition récente intitulée Black and white, est composé de 44 pages de dessins peints en blanc et noir et présente une succession de tracés de demi-cercles réalisés avec un large pinceau sur du papier. Les pages qui se font face présentent alternativement un même tracé, produit une première fois en blanc sur un fond noir, puis en noir sur fond blanc. À la première consultation, on pourrait avoir l’impression d’être devant des photographies positives et négatives de ces tracés, mais les infimes différences entre chaque dessin invitent à s’arrêter sur la répétition du même geste.

Du livre à la peinture, de la poésie au film, du vêtement aux gestes, l’exposition Bodies’ Delays présente un corpus de delays, de variations ou de répétitions, produits par la transition d’un langage vers un autre, d’une pratique à vers autre.

Philippe Decrauzat est un artiste suisse, né en 1974. Il vit et travaille à Paris et à Lausanne. Ses œuvres, qu’elles se présentent comme des tableaux, des peintures murales, des réalisations sur papier, des toiles mises en forme, des installations, des films ou encore des sculptures, ont toutes en commun une composition géométrique complexe. En explorant le statut de l’abstraction dans la culture contemporaine et en la retranscrivant plastiquement, il interroge le regard et la perception que le spectateur peut poser tant sur ses œuvres que sur l’espace. Philippe Decrauzat est co-fondateur de l’espace indépendant CIRCUIT et professeur à l’Ecole Cantonale d’Art de Lausanne (ECAL). Il a été le co-commissaire de l’exposition A Personal Sonic Geology avec Mathieu Copeland au FRAC Île de France à Paris en 2015. Ces dernières années, des expositions personnelles lui on été consacrées, dont une exposition au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris (2016-2017) ; au Magasin à Grenoble en 2014 ; au Plateau FRAC Ile-de-France à Paris en 2011 ; au Haus Konstruktiv à Zurich en 2009 ; au Secession à Vienne en 2008 ; au Centre d’art contemporain de Genève en 2006. Il a également participé à plusieurs expositions de groupe comme Construire une collection au Musée des Beaux-Arts de Rennes et à La Triennale de l’art imprimé contemporain au Musée des Beaux-Arts du Locle en 2018 ; au MAMCO à Genève en 2016 ; au Centre d’art contemporain d’Yverdon-les-Bains en 2014 ; au Carré d’Art de Nimes en 2013 ; ou encore au Palais de Tokyo à Paris en 2011.

Pierre Paulin est un artiste français, né en 1982. Il vit et travaille à Paris. À travers la poésie, l’essai, la traduction, l’édition et le prêt à porter, Pierre Paulin inscrit son travail artistique dans la culture visuelle d’aujourd’hui. L’utilisation du terme « look », que ce soit pour qualifier son travail poétique ou les ensembles de vêtements qu’il produit, est le dénominateur commun d’une pratique de l’écriture et de l’art basée sur la combinaison et la traduction de formats et de signes culturels. Du vêtement au texte, du corps aux mots, Pierre Paulin ne sépare pas l’écrit de la représentation ni l’image du discours. Le texte est omniprésent, que ce soit dans ses vêtements (poches et doublures), dans ses vidéos, dans ses livres et ses éditions. Son travail a été exposé au Palais de Tokyo en 2013, au Centre de la photographie à Genève en 2014, à la galerie Air de Paris en 2016, à la fondation Ricard et à la fondation Calouste-Gulbenkian en 2017. Toujours en 2017, il a bénéficié d’une exposition personnelle au Plateau FRAC Ile-de-France à Paris. En 2018-2019, le centre d’art contemporain CIRCUIT Lausanne lui consacre une exposition personnelle, intitulée «O o, u u». Ses œuvres sont présentées dans plusieurs collections publiques telles que celle du CNAP, du Frac Basse-Normandie ou encore du Plateau FRAC Ile-de-France.