L’été, un tout petit mot composé de trois lettres, mais si prometteur, intense et évocateur d’une belle saison où la lumière inonde, les senteurs s’épanchent, les étoiles lent, la chaleur écrase, les couleurs éclatent, les ots dansent, les corps brunissent, les yeux pétillent, les enfants jouent, les esprits se relâchent. Saison inspiratrice aimée des écrivains et des poètes. On se retrouve suspendu à ces instants délicieusement bercé par un souf e de brise qui bât en brèche nos dernières résistances, jouir de l’instant, du plaisir de découvrir, de deviner le monde par le prisme de ces créateurs que l’été nous apporte. Praz-Delavallade Paris invite cinq jeunes peintres à prendre possession des cimaises de la galerie. Généreuse saison qui nous grati e d’une nouvelle moisson d’intrigantes découvertes et nous convie à nous assoir à la table des anges, à chacun de s’exprimer en toute liberté avec pour seule règle à bord : faire que ces rencontres soient détonnantes, imprévues, dissonantes et décoiffantes.

Jean Claracq, né à Bayonne, vit et travaille à Paris. Peintre de miniatures et d’icônes, il s’attache aux images jusqu’aux moindres détails. Ses modèles lui viennent des réseaux sociaux, mais ses tableaux résonnent de mille autres références savantes. Il s’amuse des niveaux de lectures possibles en virtuose, et dépeint dans des compositions urbaines notre relation aux écrans et à la solitude avec une précision de chirurgien. Le re et d’un photographe prend la place attendue de celle du peintre, l’artiste en retrait a trouvé le moyen de mettre en scène le monde contemporain. Ses expérimentations, elles, dépassent les limites de la simple présentation des choses pour devenir expérience par laquelle ont ressent dans l’oeuvre la vie, dans la technique le sentiment.

Daniel Horowitz, né à New York, vit et travaille entre Paris et New York. Sa pratique artistique se caractérise par une combinaison unique de réalisme et d’abstraction surréaliste par laquelle son imagerie fait peu de cas de la nature originelle des objets et de leur l’échelle, créant des ambiances fantasmagoriques. Ses tableaux emploient une logique associative, où des sujets disparates sont projetés ensemble dans des paysages étranges mais psychologiquement cohérents. Ses peintures suggèrent un récit, mais cette promesse se dissout dans une ambiguïté insolite qui n’hésite pas à prendre en compte une certaine réalité contemporaine, les inquiétudes sociales et l’identité déracinée. Une iconographie dont l’objet premier confère à ses peintures une atmosphère onirique.

Golnaz Payani, née à Téhéran, vit et travaille à Paris. Peintre de formation, pour elle sa pratique ne s’arrête pas à un travail de peinture, ses oeuvres sont multiformes évoquant les riches heures de l’ornementation. Peu importe le médium, elle recycle le temps, l’attrape lorsqu’il s’est levé pour s’envoler. Golnaz le xe dans un cadre, sur toile ou sur un papier, essaie d’en garder une trace lorsqu’il s’en amme. Même si l’histoire est nie, elle nous ramène son parfum, sa couleur, sa teinte et sa trame. Ses créations fonctionnent alors comme les reliques de cette absence, de cette inéluctable dissolution du temps et de la mémoire. Son oeuvre nous invite à une ballade méditative entrecroisant différentes temporalités et réalités, mémoires collectives et individuelles.

Karine Rougier, née à Malte, vit et travaille à Marseille. Ce qui est frappant en observant son travail, c’est cette capacité qu’elle cultive à se situer entre deux mondes, un pied dans la tradition, le second jouant les outsider. Une dualité de pratique qui pourrait être antagoniste mais il n’en est rien, Karine en joue avec dextérité; représentation de personnages, de paysages inspirés du quotidien et contes populaires, de l’autre une écriture quasi automatique incarnée par la répétition obsessionnelle de thèmes ouvrant la porte de l’inconscient, une hybridité inspirée par ses voyages et son désir de croire au merveilleux et qui ré-enchante le réel sur lequel elle greffe un univers onirique à la force magique, où se déploient faune et ore fantastiques et gures mythologiques réinventées.

Apolonia Sokol, née dans le monde, vit et travaille dans le monde. Pour l’artiste la peinture est affaire de tribu, de familles, d’entourages, l’idée de collectif perdure parce que ses sujets sont issus de son entourage, transposant sur la toile les af nités électives des rencontres. Amis, amants, belles âmes de passage : tous se retrouvent traités en pied à l’échelle 1, seul ou par paire. Peintre avant tout, créant des alliances loin d’une hybridation post-moderne, Apolonia réaf rme la position du sujet, d’un moi triomphant qui parcourt le monde, son monde et agrège dans le sillage de ce corps-à-corps avec la matière brute du réel une matière brute retenant sans distinction l’histoire de l’art, la pop culture, l’émotion pré-langagière et les accidents sans qualité du quotidien.