Avec Soleil Politique, le M HKA organise la première exposition rétrospective de l’incontournable artiste belge Marcel Broodthaers dans son propre pays depuis une décennie. Ces dernières années, on a pu voir des œuvres de Broodthaers dans de prestigieux musées dans le cadre d’une exposition itinérante organisée par le MoMA et le Museo Reina Sofia. Le M HKA choisit cependant résolument d’en faire un propre projet, comme nous l’avions fait pour Joseph Beuys et pour James Lee Byars. Soleil Politique se focalise sur Marcel Broodthaers en prenant un point de départ anversois avec la galerie Wide White Space. L’exposition souhaite donner une image étendue de l’ampleur des thèmes, des stratégies médiatiques et de présentation de Broodthaers. Ainsi, on pourra voir pour la toute première fois en Belgique, Décor: A conquest by Marcel Broodthaers (1975), un prêt généreux de la Fondation V-A-C de Moscou. En même temps, nous présentons des œuvres rarement exposées et des documents trouvés lors de nos recherches préparatoires.

Soleil Politique aborde l’œuvre de Broodthaers dans l’idée que l’art est toujours politique et que la politique est une négociation constante sans conclusion. Cette affirmation de complexité s’amorce vers 1967, lorsque Broodthaers recommence à faire interférer les mots avec son œuvre plastique et présente des mots ou des textes dans différents contextes. L’apothéose démarrée à Paris dans laquelle des mots, des objets et diverses formes d’imprimés constituent un ensemble est Le Corbeau et le Renard (1968) à la Wide White Space Gallery, où il a réalisé des expositions phares entre 1966 et 1974. La galerie présentait également ses artistes à la foire d’art de Cologne, signe d’un réalité internationale à ce point-là. Son Musée d’art Moderne, Département des Aigles (1969) est venu à Anvers, où il a installé Section XVIIe Siècle dans l’espace d’art A 37 90 89.

Marcel Broodthaers, né en 1924 comme fils unique d’un père flamand, maître d’hôtel, et d’une mère wallonne est l’un des géants de l’histoire de l’art du XXe siècle. Depuis sa mort en janvier 1976, on a tenté de saisir qui était cet artiste complexe, érudit et humoristique. La fascination qu’il suscite a débouché sur un discours riche, une représentation internationale de son œuvre dans d’importantes collections publiques et d’expositions rétrospectives.

Il est communément admis que Broodthaers a entamé sa carrière d’artiste plasticien à la fin de l’année 1963, lorsqu’il a figé dans le plâtre les invendus de son dernier recueil de poèmes, Pense-Bête, et fait la déclaration suivante : « Moi aussi, je me suis demandé si je ne pouvais pas vendre quelque chose et réussir dans la vie… » Comme réaction aux nouvelles tendances dans l’art, Broodthaers commence par exposer des objets : des moules, des frites, des œufs, des briques, du charbon et des bocaux en verre. Il se sert de la stratégie du pop art en introduisant des biens locaux dans le domaine des arts plastiques.

Précédemment, Broodthaers était actif en tant que poète, journaliste, photographe. Fasciné par René Magritte, avec une grande sympathie pour Marcel Lecomte, il était membre du parti communiste. Jeune poète, il a côtoyé une avant-garde poétique et politique qui tentait de s’unir.

L’exposition est accompagnée d’un catalogue éponyme qui exhume quelques sources moins connues pour contextualiser ses expositions à Anvers parallèlement aux jalons de son œuvre. Le catalogue inclut des nouveaux textes : Anny De Decker à propos des expositions de Marcel Broodthaers à la Wide White Space Gallery, Marie-Pascale Gildemyn à propos (des noms) des personnes dans l’œuvre de Broodthaers, Hannah Brückmuller à propos de La Banque (1964-1967) et des premières performances de Broodthaers, Lotte Beckwé sur Isi Fiszman et la morale d’artiste ! Ha ! Ha !, en plus d’un interview avec Maria Gilissen-Broodthaers par Yola Minatchy et un texte de Bart De Baere.

Soleil Politique cadre dans une série d’expositions monographiques du M HKA autour de figures clés de l’avant-garde d’après-guerre actives à Anvers. En 2017, Salutations d’Eurasie mettait en lumière les activités de Joseph Beuys à Anvers et en 2018, The Perfect Kiss analysait le contact personnel de James Lee Byars avec la scène artistique bruxelloise et anversoise dans l’ensemble de son œuvre.

Le M HKA souhaite remercier tous les prêteurs et en particulier Maria Gilissen-Broodthaers et Marie-Puck Broodthaers pour leur implication active et leurs multiples suggestions. Nous sommes reconnaissants envers tous les témoins enthousiastes qui ont accepté de partager avec nous leurs souvenirs : Nicole Daled-Verstraeten, Anny De Decker, Philippe De Gobert, Isi Fiszman et Laurence Taca, Yves Gevaert, Benjamin Katz, Reiner Speck, Walter Swennen et Roland Vanden Berghe.