Lorsque des milliards d’euro sont soustraits aux budgets nationaux par la fraude et la corruption, l’Etat n’a plus les ressources pour mener les politiques sociales décidées par les représentants des citoyens élus au Parlement.

Le crime des élites est une atteinte aux intérêts supérieurs de la nation1.

Primauté du système de valeurs qui sous-tend toute démocratie

Ce n’est pas la nature de l’organisation sociale et administrative, mais bien la nature humaine et, dès lors, la qualité des hommes qui la dirigent, qui donne, ou non, naissance aux pratiques de la corruption.

Toutefois, la question ne relève pas seulement de l'intégrité morale de ces derniers, mais aussi de la légitimité du pouvoir qu'ils occupent ou, plus précisément de leur propre perception de cette légitimité, motif qui invite à analyser les fondements et les circonstances qui permettent de réunir ces conditions de légitimité aux yeux de la société en question.

La culture est un ensemble de comportements acquis et transmis par des symboles qui constituent un produit caractéristique des groupes humains. Les traditions et particulièrement les valeurs en constituent le cœur. L'orientation culturelle d'une société reflète l'interaction complexe des valeurs, attitudes et comportements de ses membres.

Dans une société multiculturelle, la législation est le produit des interactions entre les valeurs, attitudes et comportements des membres des différentes cultures qui composent l'Etat en question. Dans un tel contexte, le problème de la légitimité se pose de manière encore plus présente, et dès lors aussi celui de la corruption.

La corruption implique une loi qui l'interdit. La loi présuppose un système politique pour l’instituer, et un système institutionnel pour en garantir le respect par tous les membres de la collectivité à laquelle elle s'impose.

La corruption est une infraction au système communément établi et reconnu pour le partage des richesses et du pouvoir. Elle a dès lors aussi pour préalable la prohibition de l'usage de la force et de la violence au bénéfice du respect de la loi. C'est là une position culturelle qui relève d'un choix de société.

Il va dès lors de soi que la corruption ne peut être qualifiée comme telle que lorsqu’il existe un ordre juridique légitime pour la qualifier. On ne peut, par exemple, qualifier de comportement corrupteur l’offre de cadeaux pour obtenir un avantage dans les sociétés traditionnelles où l’économie est encore sous-monétisée, et où les échanges se produisent pour l’essentiel, en nature et selon des codes relationnels non écrits.

Pour ce même motif, en « période de transition » (chute des régimes communistes, des dictatures…), il peut être difficile de qualifier de « corrupteurs » des comportements prédateurs, dans la mesure où la prédation est un moyen de faire changer les rapports de forces dans une société, à un moment où l’Etat est absent ou décrédibilisé. Car la loi doit non seulement exister, mais être connue et reconnue pour s’appliquer.

En l’absence d’ordre juridique légitime en vigueur, restent les critères de morale, éminemment relatifs au gré des cultures dans lesquelles ces comportements se produisent. Ainsi, tuer à cette même fin sera cependant, bien que pratiqué assez souvent, généralement interdit ou, à tous le moins considéré comme un mal, moralement condamné.

Tuer est interdit. C’est un principe fondamental des démocraties européennes.

D’autres cultures ne font pas de l’interdiction de tuer un principe fondateur de leur organisation interne. C’est, par exemple, le cas de ceux des courants de l’Islam qui se fondent sur la Charia ou la Jihad.

Même si l’interdiction de tuer – qui croise la conservation de l'espèce et rencontre le droit à la vie - est vraisemblablement un principe plus productif à l’échelle de l’humanité que son contraire, force est de constater que l’interdiction de tuer résulte d’un choix de société.

A fortiori en est-il de même du respect des libertés fondamentales, liberté de parole, d’expression, d’association. Il s’agit en réalité de produits d’un « contrat social », résultat d’une longue évolution généralement considérée comme « civilisatrice », qui, en Occident, puise ses racines le principe fondamental d’égalité des individus issu de l’héritage judéo-chrétien.

Héritage que la civilisation occidentale a progressivement sécularisé, d’abord en droit interne « national » dans le sillage de la Révolution française, pour, au XXème siècle, le prolonger sur la scène internationale à travers la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, les principes régissant les Nations Unies, et se voir adopter, via le Conseil de l'Europe, au début des années'90 jusqu'au coeur de l'Asie Centrale.

Il faut dès lors être conscient du fait que la légitimité de la loi à l’intérieur d’un Etat, et notamment la condamnation de la violence (terrorisme...), résultent de choix de société : il ne s’agit pas là de positions légitimes « par nature » mais « par contrat ».

En défendant ces principes, on ne défend pas un « état de nature », mais un ordre de valeurs qui tire sa légitimité d’un héritage culturel, codifié au cours du temps. Cet ordre de valeurs, dont le cœur se retrouve, dans la plupart des Etats Européens, au sein des constitutions, ne peut évoluer et s'y modifier que selon des procédures garantes de l’égalité des droits des citoyens, à savoir par la procédure parlementaire. Le « système démocratique » est ainsi la formule la plus adéquate imaginée à ce jour pour traduire dans la réalité individuelle et sociale ces valeurs communes et partagées.

D’où l’importance, à une époque où la circulation des personnes est susceptible à terme de modifier la structure des populations, de ces textes « constitutifs », garants des valeurs fondamentales d’une société, et qui ne peuvent être modifiés par une simple majorité.

La corruption menace la sécurité

C’est dès lors dans cette perspective que le concept de sécurité doit être abordé, concept que nous concevons en effet, dans nos sociétés occidentales, comme fondamentalement composé du droit à la vie et du droit à la liberté. Garantir la sécurité, c’est, à nos yeux, assurer le droit à la vie et l’exercice des libertés.

Le droit canadien est instructif à cet égard : l’incrimination pénale de « menace » est activée dès qu’une « personne raisonnable » peut percevoir le risque qui le menace comme actualisable, et ce indépendamment de l’intention de l’agresseur de mettre sa menace effectivement à exécution. Car, dit la Cour2, la démocratie suppose des citoyens libres d’agir et de choisir. Cette constatation met clairement en évidence l’importance de la sécurité pour pouvoir exercer sa liberté, préalable au fonctionnement d’un système démocratique.

A l’intérieur de l’Etat démocratique, c’est l’application des lois, comme expression des choix de sociétés, qui garantit la sécurité. Ceci implique non seulement l’existence d’un cadre législatif, mais également d’institutions pourvues de moyens pour en assurer la mise en œuvre.

C'est ce consensus formulé à travers la loi qui permet non seulement de condamner la corruption en tant que trahison de la "communauté" qui s'exprime dans l'Etat, mais aussi de faire concrètement respecter (volontairement) cette loi, et d'en garantir (fut-ce par l'usage de la force légitime -monopole des institutions étatiques-) l'application.

La philosophie qui préside au développement du droit international, système contractuel entre Etats souverains, n’est pas fondamentalement différente, si ce n’est qu’y apparaît clairement, par son absence et donc a contrario, un préalable à l’effectivité du système démocratique.

En effet, la démocratie présuppose, à travers les processus de représentativité, l’égalité des individus qui la compose. Lorsque la représentativité est perturbée par des rapports de force qui s’imposent à elle, l’ordre démocratique ne peut s’établir. C’est le cas du système international où, au-delà d’une souveraineté égale des Etats, ce sont les rapports de forces –politiques, économiques, technologiques… - qui s’imposent. Ce qui est qualifié de « réalisme » prime dès lors sur la mise en œuvre de la règle proclamée. Une telle situation n'est pas sans présenter des risques pour la sécurité. Voici pourquoi.

Les capacités technologiques et de communications des individus sont restées, jusqu’au début du XXème siècle, globalement inférieures à celles des Etats. Ceci permettait à ces derniers de régir leurs « territoires » « localement », et d’y garantir une sécurité à la mesure des exigences du développement socio-culturel du moment.

Force est toutefois de constater que les guerres menées pour l’ambition des princes, ou par rivalité entre familles régnantes, n’étaient pas sans conséquence pour la sécurité des habitants des royaumes de l’époque, qui n’avaient d’autre possibilité que de les tolérer.

Les facteurs personnels, étrangers aux intérêts de l’Etat, ont, de tout temps, influencé les politiques étrangères, avec des conséquences pour la « sécurité », tant interne qu’internationale.

A fortiori, ceci est d’autant plus vrai à l’ère de la globalisation. Non seulement les individus ont le pouvoir de causer des guerres (la campagne d’Irak suite aux attentats du 11/9/01 aux USA en est un exemple). Mais le pouvoir étatique (et les organisations internationales, comme le démontrent les crises concomitantes de l’ONU, l’OTAN, l’UE) a, parallèlement, de plus en plus de difficulté, diffusion des capacités technologiques oblige, à s’imposer aux intérêts individuels.

Et ce alors qu’il faut encore constater que plus les capacités humaines, individuelles et combinées, se développent, plus la volonté humaine doit s’exercer si l’homme veut préserver ses valeurs.

A défaut, c’est le possible de chacun qui régit la réalité, et non plus les choix de société tels qu’exprimés suite aux débats démocratiques exprimés à travers la loi et mis en œuvre par les institutions.

Lorsque des milliards d’euro sont soustraits aux budgets nationaux par la fraude et la corruption, l’Etat n’a plus les ressources pour mener les politiques sociales décidées par les représentants des citoyens élus au Parlement.

Lorsque ce manque de moyens se traduit en écart croissant entre les classes sociales à l’intérieur des Etats, en sous-financement des politiques de redistribution sociale, d’intégration des immigrés, lorsque la corruption aux frontières, dans les ambassades, dans les services de polices et les instances judiciaires laissent la porte ouverte à l'immigration illégale, avec les risques de déstabilisation des équilibres politiques, ethniques, linguistiques, culturels d'un Etat, lorsque le non-respect des lois toléré pour certains fait de ces derniers la cible facile d’une corruption non seulement d’origine interne à l’Etat mais provenant de groupes d’intérêts, sinon de services secrets, étrangers, c’est la stabilité interne et externe de l’Etat qui se fragilise, créant autant de failles en matière de sécurité nationale et internationale.

La corruption ne mine pas seulement le contrat social qui régit la vie interne de nos sociétés. Elle entrave aussi le développement économique en particulier dans les pays en voie de développement. Ainsi, dans certains pays d’Afrique gouvernés de manière autoritaire, la gestion des fonds de la coopération au développement se fait selon la loi de la prédation, ce qui ne contribue ni à la croissance économique, ni à la gestion des conflits internes. Dans les démocraties « illibérales », pays qui ont adopté le suffrage universel et l’économie de marché sans garantir effectivement les libertés civiles (éducation, information…), la coopération est canalisée à travers des instruments peu transparents, des clans, une clientèle bénéficiaire de la corruption, avec des conséquences similaires3.

Dans ces cas, l’Etat, entre les mains d’une élite restreinte, devient un objet à saisir, objet de coups d’Etat plus ou moins feutrés ou sanglants, et d’une instabilité de nature à mettre en péril la sécurité nationale et internationale comme le démontrent les causes qui sous-tendent le terrorisme ces dernières années. C’est pour ces motifs que la Convention de l’OCDE interdit à présent la corruption de fonctionnaires étrangers. Cependant, précise Eva Joly, il est toujours techniquement possible de les corrompre en passant par une filiale installée hors du périmètre de l’OCDE.

La démocratie américaine présuppose l’égalité de tous devant la loi. Et cependant, les résidents étrangers sur le sol américain sont soumis à d’autres prescrits que les citoyens américains depuis la législation en matière de sécurité suite aux attentats de septembre’01. Le droit du sang semble regagner du terrain au détriment du droit du sol, et ce au moment où la circulation des individus à travers les frontières s’accroît exponentiellement4. La discrimination est toujours source de rupture du consensus, avec les risques de fracture sociale qui en découlent et les engrenages, parmi lesquels le développement d'une corruption à objectif de "survie clanique" et la violence prenant racine dans les ressentiments, qu'ils enclenchent en matière de sécurité.

Depuis la chute du Mur de Berlin et l’explosion des moyens de communication, les grands réseaux criminels actifs sur la scène mondiale, cartels colombiens, mafias italienne et russe, triades chinoises et autres réseaux asiatiques collaborent eux. Dans les années qui viennent, les démocraties devront de plus en plus souvent défendre leurs valeurs et leurs structures face à des alliances entre guérillas, terrorisme et criminalité organisée, dans un environnement urbain souvent surpeuplé où les technologies seront à portée de tous. Telle est l’échelle de la menace.

Or, au moment où l’individu recourant aux technologies et moyens de communication, circule de plus en plus facilement à travers les frontières, la volonté politique accompagne le mouvement en déclarant les libertés de circulation, supprimant notamment passeports et visas, ces instruments de contrôle des populations. Faut-il dès lors s’étonner de l’afflux de clandestins qui débarquent sur les côtes d’Europe ? S’étonner de voir doubler, en Europe Occidentale, les arrestations de ressortissants originaires de pays qui ont vu supprimer ces frontières administratives ? Et se dégrader la sécurité dans les cités au point d’y voir se développer des extrémismes de droite qui, à leur tour, nourrissent le sentiment d’insécurité ?

La juge norvégienne Eva Joly attire l’attention sur l’enjeu stratégique de la grande corruption.

Plusieurs témoins... ont raconté que les commissions allouées dans (le) secteur (de l’armement) atteignaient 20% à 40% […] Sur les années 1991-1999, les exportations d’armement annuelles officielles de la France se montent à 5,61 milliards d’euro par an. Un taux moyen de 20% de commission aboutit à 1,12 milliards d’euro de fonds occultes dégagés chaque année5

Lorsqu’un régime autoritaire s’effondre et que l’impunité de ses dirigeants se dissipe, la grande corruption remonte au grand jour : entre 4 et 10 milliards de dollars pour le congolais Mobutu Sese Seko ; 5 milliards de dollars pour le Philippin Ferdinand Marcos ; jusqu’à 40 milliards de dollars pour l’indonésien Suharto ; 5 à 10 milliards de dollars pour Saddam Hussein […] A chaque fois nous voulons croire qu’il s’agit d’une folie individuelle. […] Cet argent n’est pas caché dans je ne sais quel établissement douteux de Nauru ou de Beyrouth […] la grande corruption se déroule à ciel ouvert, dans les établissements financiers les plus respectables. Elle prospère à la City de Londres ou à Zurich6.

Et le magistrat italien F. Imposimato de poursuivre :

Avec la corruption, les organisations criminelles détournent les autorités politiques et administratives de l’intérêt collectif, mettent à mal les principes de la libre concurrence et créent de véritables monopoles en matière de gestion des marchés publics7.

Dans certains Etats Occidentaux, les financements des élections présidentielles proviennent de sociétés de toutes nationalités. Il est non seulement souvent impossible d’identifier les termes de l’échange mais, de surcroît, parfois bien difficile de garantir l’origine des fonds versés8. Quant aux dirigeants corrompus des sociétés démocratiques, ils risquent ainsi d’être l’objet de chantage non seulement en matière de politiques intérieures mais également lorsqu’il s’agit de définir les intérêts internationaux stratégiques du pays.

Ainsi, la corruption mine aussi les souverainetés. « Le crime des élites est une atteinte aux intérêts supérieurs de la nation9 ». Quant aux réseaux criminels, ils se camouflent précisément à l’interface, presque hors contrôle, des politiques internes et étrangères des Etats.

C’est dans ce contexte aujourd’hui que la corruption empêche de mettre en œuvre les lois, fruit du consensus social, et les politiques choisies suite au résultat des urnes, notamment, les politiques de développement. Elle empêche aussi l’administration d’être efficace. Elle détourne de la sorte les droits des uns au profit d’avantages illégitimes pour d’autres.

A terme, la corruption suscite la perte de respect pour les législations en vigueur dans l’ensemble de la société, et contribue au désintérêt, sinon au mépris pour le politique.

‘La complaisance’ avec les circuits de la grande corruption ‘provoque un sentiment de vide politique, intellectuel et moral’ explique le juge espagnol Balthazar GARZON. Elle entretient l’image d’un ‘crony capitalism' (capitalisme de compères) […] : un club fermé de dirigeants où la connivence remplace trop souvent la loi et où l’entente occulte supplante la concurrence, commissions à l’appui. […] La grande corruption mine le sentiment d’appartenance qui nous relie les uns aux autres […] Superposer au contrat social un système de clientèle est une lourde responsabilité… Un jour, demain peut-être, nous nous réveillerons avec le sentiment diffus d’avoir laissé se détruire notre maison commune10.

Contrat social contre corruption La corruption neutralise donc le pouvoir de contrôle de l'Etat. Or, en abdiquant la volonté et laissant libre champ au possible, le pouvoir se prive de la capacité de « gouverner », soit de représenter effectivement ceux qui l’ont élu. Sous peine de devoir réintroduire, dans l’urgence et sous la pression de ces mêmes électeurs, des mesures ad hoc discriminatoires ou restrictives des libertés, comme on l’observe en Occident suite aux attentats du 11 septembre ’01, et comme la pression se fait plus forte encore suite (sois prétexte ?) à la crise du Coronavirus.

Du mauvais usage des crises pour réduire les libertés ? Ce n’est pas être, par nature, « contre l’étranger » que de se mettre en mesure de contrôler les entrées dans un espace organisé comme souverain. Mais tout dépend des critères qu’on choisit pour réguler cet accès à nos territoires, des moyens qu’on utilise et des buts que l’on poursuit.

En résumé, les démocraties européennes ne tirent pas leur légitimité d’un état de nature mais sont le produit de choix de société. Choix qui se manifestent dans le contrat social, expression d’un système de valeurs et codifié dans l’Etat de droit.

C’est ce système, identifié comme le plus apte à garantir notre conception de la sécurité, droit à la vie et à la liberté, que la corruption menace jusque dans ses fondements.

Le jour où nous ne jugerons plus l’interdiction de tuer comme un absolu (interdiction de la peine de mort…), où nous accepterons qu’on nous impose une religion, il n’y aura plus motif à lutter contre le dictat d’intégrismes, politiques ou religieux, qui vont jusqu’à s’arroger droit de vie et de mort sur leurs adeptes/sujets.

Le jour où nous accepterons comme légitime le droit du plus fort, il n’y aura plus lieu de lutter contre ces réseaux criminels qui détournent et pervertissent les choix de sociétés au profit de leurs seuls intérêts en usant des armes de la corruption et de la violence, mettant en danger la vie et les libertés des citoyens. Le jour où notre société acceptera une telle situation, il n’y aura plus matière à lutter contre ces réseaux.

Mais tant que nos choix de société seront fondés sur l’égalité de droit des individus, exprimée en l’occurrence par la représentativité parlementaire à défaut d’avoir pu identifier système plus efficace à cette fin, il est suicidaire de contempler passivement ces attaques menées à l’encontre du système démocratique, fut-ce de la manière la plus perverse et la plus dissimulée. Car encore faut-il pouvoir les repérer, même lorsqu’elles se camouflent et se tapissent au sein de nos institutions.

A défaut, on y perdra la sécurité interne et la sécurité internationale qui, à l’ère de la globalisation, détermine de plus en plus nos ressources et nos vies quotidiennes, jusqu’à abdiquer nos libertés sans avoir eu l’occasion de nous en rendre compte.

L’écart croissant dans la distribution des richesses au sein même de nos Etats, les attaques terroristes et la crainte diffuse et permanente qu’elles inspirent, les mesures de restriction des libertés, discriminatoires et dès lors inacceptables, comme elles s’annoncent dans la crise du coronavirus, donnent la mesure des enjeux de ce jour. Ils concernent directement tous les citoyens de l’Union Européenne …

Qu’est-ce qu’une nation, sinon un contrat social, une communauté de citoyens qui décident de vivre ensemble ? 11.

Notes

1 Joly Eva, Est-ce dans ce monde-là que nous voulons vivre, éd Les Arènes, Paris, 2003, p. 327.
2 Le but et l’objet de l’article 264 du code pénal est d’assurer une protection contre la crainte et l’intimidation. Le législateur, lorsqu’il a adopté l’article, a agi pour protéger la liberté de choix et d’action de la personne, une question d’une importance fondamentale pour les membres d’une société démocratique », Cour Suprême de Cassation, 1991, 3S.C.R., cité par R.v. Mc Craw n°21684, 4/6/91.
3 Gori Umberto, La Cooperazione allo sviluppo, ed Franco Angeli, Milan, 2003.
4 Le statut des prisonniers de Guantanamo posait la même question sous un autre angle. C’est encore cette question qui revient lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre un des buts des guerres en Irak, puis en Syrie : comment y établir des démocraties qui ne soient pas républiques islamistes, s’il s’avérait que les intégristes devaient y convaincre une majorité de la population ?
5 Joly Eva, Est-ce dans ce monde-là que nous voulons vivre, éd Les Arènes, Paris, 2003, p. 269-272, passim.
6 Ibidem, p. 279- 280. A noter qu’en Bulgarie, 82% des entreprises avouaient encore recourir à la corruption en septembre 2003.
7 Imposimato F., « La corruzione in Europa », Conférence, Lyon, 1997 (trad. de l’italien).
8Ainsi, ce n’est qu’à la dernière minute que la présence de Grigori Loutchanski, à l’époque signalé par les services de renseignements occidentaux comme membre de la mafia russe, a été évitée comme souscripteur à un dîner électoral du parti démocrate américain en 1995.
9 Joly Eva, Est-ce dans ce monde-là que nous voulons vivre, éd Les Arènes, Paris, 2003, p. 327.
10 Ibidem, p. 282-284, passim.
11 Ibidem, p. 309.