En 1789, les Français renversent leur monarchie et instituent la Première République française. La Déclaration française des droits de l’homme et du citoyen, fruit de la révolution, a été rédigée par des représentants du clergé, des nobles et des roturiers pour donner forme aux réflexions des chefs de file des Lumières, tels que Voltaire, Montesquieu, les encyclopédistes et Rousseau. Elle s’en prenait au système juridique et politique de la monarchie et définissait les droits naturels de l’homme comme « la liberté, la propriété, la sécurité et le droit de résister à l’oppression2.

Sages observations de ses ancêtres européens, qui constataient qu’à défaut de sécurité physique, de sécurité économique et de droit de résister à l’oppression, les citoyens ne peuvent exercer leurs droits à la liberté. On ne pourrait trouver thème de dissertation plus adéquat comme critère de sélection pour accéder au pouvoir dans une démocratie effective, digne de ce nom. À défaut, comme à ce jour, ils sont de plus en plus nombreux à limiter droits de grèves et de manifestations : ni sur les places, ni à l’entrée des usines, ni sans autorisation …

2000 :

Membre de l'Union européenne depuis 1995, l'Autriche est de plus en plus séduite par les sirènes populistes du parti d'extrême droite FPÖ (de Jorg Haider). Après le succès électoral du parti conservateur ÖVP sous la houlette de Sebastian Kurtz (qui vient de démissionner pour cause d’enquête pour corruption), celui-ci a choisi de former une coalition avec le FPÖ3.

2021:

Depuis six ans (2015) que le parti populiste Droit et Justice (PiS) dispose de toutes les clés du pouvoir en Pologne, il multiplie les réformes controversées: mise au pas de la justice et des médias, restriction du droit à l’avortement. Ces mesures ont amené l'Union européenne à ouvrir une procédure d'infraction contre Varsovie4.

Depuis plus de vingt ans, l’Union Européenne est assaillie par ses vieux démons. Pour faire bref, elle se voit confrontée à un retour, masqué, de la loi de la jungle, de la loi du plus fort au détriment des droits fondamentaux du citoyen conquis au fil du XXe siècle. Enoncés une première fois en 1948 aux Nations Unies dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme5, une seconde fois en 1953 au Conseil de l’Europe dans la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales6, ces engagements ont été renouvellés par l’Union Européenne dans la Charte des Droits Fondamentaux.

Proclamée une première fois à Nice le 7 décembre 2000, la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne a été adoptée dans sa version définitive par les présidents de la Commission européenne, du Parlement européen et du Conseil de l’UE le 12 décembre 2007. Elle est ensuite devenue contraignante juridiquement avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne le 1er décembre 2009.

Tous ces textes qui s’imposent aux droits constitutionnels des États membres consacrent les principes de Dignité, Liberté, Égalité, Solidariété, Citoyenneté, Justice.

Février 2000, l’Autriche la première affectée7

Le 3 février 2000, l’Autriche portait au pouvoir le parti d’extrême droite de Jörg Haider. L’Europe, pour la première fois se trouvait confrontée à la présence de ministres d’extrême droite au sein du Conseil Européen.

Pourquoi l’Autriche la première, alors que l’extrême droite s'infiltrait déjà dans les démocraties européennes depuis plus de dix ans ?

L’Autriche tire ses racines de l’Empire Autro-Hongrois. Un empire n’est pas une forme de gouvernement particulièrement démocratique, même si on ne peut juger l’histoire à l’aune de nos critères de maintenant. Ses descendants restent aujourd’hui encore influents dans une diaspora européenne. On les retrouve notamment, dans toute l’Europe, dans les réseaux de l’”Opus Dei”, force concervatrice s’il en est.

En 1939, l’Autriche s’est intégrée dans le troisième Reich. Elle a, pendant les années de guerre, adopté la politique nazie au titre de politique nationale. Après la guerre’40-’45, il n’y a pas eu dans ce pays, de procès de Nuremberg comme en Allemagne. Il n’y a pas eu davantage de réparations aux victimes de guerre, comme c’est encore aujourd’hui le cas en Allemagne qui a toujours des articles budgétaires à cet effet. La mémoire qui n’est ni formalisée, ni entretenue a tendance à s’estomper.

En 1989, lors de la chute du Mur de Berlin, l’Autriche, pays de première ligne face au “Bloc de l’Est” a vu en quelques jours des milliers de “réfugiés de l’Est” traverser sa frontière. C’est elle, petite démocratie au territoire montagneux, difficile à habiter et comptant seulement huit millions d’habitants, qui a pris le choc frontal de ce qui aujourd’hui est devenu le processus (quasi) finalise d’élargissement de l’Union Européenne aux anciens pays d’Europe de l’Est.

L’Autriche est aussi devenue le premier pays d’accueil où se sont réfugié les capitaux “rouges”, c.à d. les capitaux des Etats communistes “privatisés” et placés dans les banques européennes “sûres”, au profit personnel de ceux qui en avaient la gestion fin des années’80 et début des années’90, dès qu’ils comprirent que la fin des nomenclatura communistes se profilait. Des milliards de dollars ont ainsi été accueillis dans les banques autrichiennes, suisses, belges, …. Ils sont aujourd’hui entre les mains de ceux qui, selon les services de renseignements européens, se sont recyclés dans les mafias de l’Est.

Or, qu’est-ce que la mafia, si ce n’est un capitalisme sans règles, hors la loi, en d’autres termes où règne la loi du plus fort, loi de la nature en situation de chaos, comme le vécurent les sociétés de l’Est après l’effondrement des régimes communistes.

L’Autriche n’était, en réalité, pas la première à porter au pouvoir un parti à connotation d’extrême droite. Au milieu des années’90, l’Italie qui n’a pas davantage fait les comptes avec son passé, vivait une alliance entre le MSI (aujourd’hui Fratelli d’Italia8), parti alors néo-fasciste, la Ligue du Nord (Lega Nord9) et le magnat des communications Silvio Berlusconi poursuivi dans nombre d’affaires pour infactions financières et autres.

De fait le capitalisme, lorsqu’il ne respecte plus les lois (capitalisme “sauvage”) tire avantage d’alliances avec des partis qui ont un respect relatif de ces mêmes lois. Il y gagne la capacité des partis d’extrême-droite d’édicter des lois qui ne respectent pas les libertés individuelles (garantie, en particulier, pour les plus faibles), partis qui envisagent aussi la possibilité d’imposer par la force dans la vie économique et sociale ce qu’ils ne peuvent obtenir par le droit. Suite à quoi pareilles formations deviennent beaucoup plus faciles à instrumentaliser. Cela n’échappe pas à ceux qui ont pris l’habitude de manier le pouvoir par l’argent : financer de tels partis donne une arme supplémentaire pour les posséder.

Depuis lors de surcroit, ces mouvements ont trouvé d’autres voies. C’est à ce titre que les sources de financement des partis d’extrême-droite, lorsqu’elles proviennent des zones grises, sinon franchement noires de la mafia, prennent toute leur importance. Utilisées pour griper les rouages des institutions, notamment via la corruption, ils accumulentainsi en toute impunité un patrimoine croissant, et augmentent leur pouvoir en infiltrant parlements, gouvernements et instances judiciaires afin tantôt de les manipuler tantôt de les paralyser. La multiplication des scandales politiques en Europe ne peut plus être tenue pour le fruit du hasard et de l’inadvertance. Parallèlement, ils jouent sur un sentiment d’insécurité croissant dans la population, se présentant généralement comme “sauveur” contre un “envahisseur” extérieur, autrefois le juif, aujourd’hui l’étranger.

S’assurant d’une apparence de “mains propres”, tout en détournant l’attention de leurs propres “affaires”, ils se sont ainsi infiltrés à l’intérieur meme des institutions, au sein des services de l’Etat, comme le démontre la récente alerte du Président du Comité de Suivi des Services de Renseignements10 de l’Etat belge. Et de fait, si les services de sécurité memes ne font plus correctement leur travail …

L’Europe s’est réveillée très (trop?) tard

Suite au Conseil Européen sur les Affaires Intérieures et Justice de Tampere (1999) qui avait soulevé ce coin du voile, le réveil fut brutal pour les Européens.

The European parliament urged the EU to be ready to suspend the membership of any Austrian government if it made a "serious and persistent" breach of basic EU principles, as defined in the 1997 Amsterdam treaty11.

En février 2000, le Conseil Européen décidait dés lors de mettre l’Autriche au ban des Etats de l’Union Européenne. Pour sa part, la Commission Européenne, gardienne des Traités, et donc de la légalité, regrettait les développements politiques en Autriche, mais constatait que les Traités ne lui permettaient pas de prendre des mesures contre un Etat Membre sur base de déclarations d’intentions ou de programmes politiques. Seuls des actes contraires aux libertés fondamentales qui fondent l’Union Européenne peuvent donner lieu à sanctions. Une démocratie se doit en effet de respecter les lois qu’elle a elle-même édictées, sous peine d’utiliser les mêmes armes que ses adversaires, et donc de ressembler à ceux qu’elle condamne.

La question restait de savoir si ces positions légaliste et politique seraient efficaces et atteindraient l’objectif visé, à savoir enrayer la progression de l’extrême-droite en Europe. Car il ne faut pas s’y tromper. Au delà des déclarations de principe, c’était d’abord l’extrême-droite présente dans tous les Etats-membres de l’Union Européenne qui en 2000 était visée par ces déclarations et positions.

Déclarations et positions disproportionnées disaient certains. Peut-être par leur caractère inhabituel d’ingérence effective dans les affaires intérieures d’un Etat membre par d’autres membres de l’Union. Compréhensible cependant si l’on reconnaissait le véritable objectif des violations en cours. L’extraordinaire de telles positions était encore plus inquiétant pour les motifs suivants. La grandiloquence semblait d’abord traduire la peur face à une situation, en l’occurrence la progression d’une extrême-droite, que l’on ne parvient pas à maîtriser chez soi. Elle traduisait aussi la faiblesse d’institutions qui ne se sont pas donné les moyens de combattre les ennemis de la démocratie.

Interdire au choix des électeurs de se traduire en programme de gouvernement est fondamentalement anti-démocratique. En 2000, les Autrichiens l’avaient bien percu, ce dont témoignent leurs déclarations officielles et celles des citoyens. En 2021, c’est au tour du pouvoir polonais de s’en revendiquer.

2021, La faiblesse de l’Union Européenne a permis à la Pologne de se dissocier

Le droit international veut que les Etats puissent légitimement exercer leur souveraineté pour prendre des positions politiques.. Ces positions toutefois pour etre légales ne peuvent violer les traités ratifiés, sauf à les dénoncer. Or, l’article 6 du TUE prévoit, en son premier paragraphe, que la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne a “la même valeur juridique que les traités”. La Charte des Droits fondamentaux de l’Union Européenne est donc dotée d'une portée juridique identique à celle des traités depuis l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009. Et les Traités de l’Union Européenne consacrent la primauté du droit européen12 sur les droits nationaux, constitutions comprises, pour lesquels ils constituent, en réalité, une sorte de cinture de sécurité, loin d’etre dépourvue d’utilité comme l’expérience le démontre.

Observons que ce principe de souveraineté des Etats est par ailleurs de plus en plus généralement contesté sur base de la primauté croissante des droits fondamentaux des personnes, primauté par laquelle le pouvoir souverain des Etats peut etre contesté sinon condamné13.

Reprenant pour l’essentiel le projet de Charte qui figurait dans le Traité établissant une constitution pour l’Europe (TCE), ce dernier donne une valeur contraignante à la Charte, sans pour autant l’intégrer juridiquement.

La rédaction finale du Traité répondit cependant imprudemment aux demandes du Royaume-Uni (qui depuis a quitté l’Union européenne au 31 janvier 2020) et de la Pologne de ne pas être liés par la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne, et ce par dérogation (clause d’ “opt out”14). La République tchèque a négocié par la suite une dérogation similaire15.

Faiblesse, imprudence ou agenda caché? Force est de constater qu’à présent l’Union Européenne, et ses citoyens, payent le prix de cette tolérance sur un sujet qui, en réalité, n’eut jamais du permettre tolérance. Il est en effet des tolérances qui provoquent l’intolérance, comme c’est ici le cas. Le conflit né de cette circonstance de la Pologne contre les institutions européennes constitue la menace la plus grave qui ait jamais exité contre l’existence meme de l’Union Européenne, a déclaré le Président du Parlement Européen David Sassoli ce 21 octobre 2021. On ne peut dés lors que soutenir l’action en justice que prépare le Parlement contre la Commission Européenne pour cause d’inaction16.

Cette menace contre l’Etat de Droit dans l’Union Européenne vient de surcroit à un moment ou nombre d’Etats ont pris l’habitude de violer les droits fondamentaux des citoyens, le green pass17 en étant la marque la plus visible qui s’étend à vue d’oeil en Europe, un instrument en évidente violation des Conventions de sauvegarde des droits fondamentaux des citoyens comme l’a encore rappelé l’Assemblée du Conseil de l’Europe à une majorité écrasante il y a quelques mois18. Il est, il va de soi, beaucoup plus difficile de reprocher d’une manière crédible, et dès lors efficace, à un Etat membre ce que l’on fait simultanément, impunément, chez soi.

Sans doute n’est ce pas un hasard que les discriminations les plus graves que cet instrument prévoit pour ceux qui s’opposent à son imposition aient été prises par deux Etat qui ont omis de faire le compte avec leur passé, l’Italie (interdiction de travailler) et l’Autriche qui s’apprete à son tour à exclure de toute vie sociale ceux qui refusent de plier.

Déjà en 2000, la réaction des Etats de l’Union Européenne était tardive

Seuls des actes contraires à ces libertés fondamentales qui fondent l’Union Européenne peuvent donner lieu à des sanctions. Contrairement à l’Autriche qui, en 2000, exprimait des intentions de se dissocier de droits fondamentaux des citoyens, la Pologne a ces dernières années pris des décisions qui violent sans le moindre doute les droits fondamentaux garantis, notamment celui de bénéficier d’une justice impartiale et indépendante. Aux juges polonais, il est notamment devenu interdit d’appliquer le droit en conformité avec la hiérarchie des normes en vigueur dans l’Union Européenne, cette “communauté d’Etats” à laquelle chacun des Etats membres a librement adhéré en ratifiant les Traités.

It's too simplistic to say we must keep Austria in Europe at all costs, argued the Belgian foreign minister. Europe can very well do without Austria. We don't need it19, une déclaration qui en février 2000 visait l’Autriche.

En octobre 2021, force est de constater que la conscience des dirigeants européens de ce péril mortel pour les démocraties que constituent les violations des droits fondamentaux s’est considérablement émoussée. Dans le bras de fer avec Varsovie, les chefs d'Etat et de gouvernement ont réaffirmé "leur conviction que l'Etat de droit et l'indépendance judiciaire sont absolument fondamentaux". Mais ils ont temporisé sur l’application des ripostes mises à l’étude par Bruxelles20. D’où la réaction du Parlement Européen qui vient de demander à ses services juridiques de "préparer une action en justice contre la Commission européenne pour sa non-application du Règlement sur la Conditionnalité", en d’autres termes d’avoir le courage de passer des paroles aux actes21.

C’est en effet non seulement par la qualification dans les déclarations mais surtout par les mesures effectivement prises, que la démocratie peut être forte et résister contre les mouvements d’extrême-droite.

En Belgique au début des années 2000, correctionnaliser l’incrimination des actes et écrits à caractère raciste fut, à cet égard, un outil légitime et efficace, de meme que le fut la loi sur la responsabilité pénale des personnes morales, qui peut conduire à l’interdiction d’associations de telle nature. Avec pour résultat qu’appliquées avec diligence (la société civile, les ONG22 jouent un rôle important dans le rappel et la mise en oeuvre de la vigilance), devoir sanctionner le vote démocratique des électeurs risque moins de se présenter. Le simple respect des lois peut alors empêcher de tels mouvements de se développer, a fortiori de se présenter aux élections.

Les gouvernements qui se signalent par leurs déclarations tonitruantes contre l’extrême-droites à l’étranger gagnent ou perdent en crédibilité selon la cohérence de leurs actes dans leur propre pays, à l’égard de leurs propres citoyens23. Le pire serait en effet que la population doive se rendre compte que les déclarations concernant l’étranger ne sont là que pour mieux camoufler ce qui se passe à l’intérieur du pays, et que les droits individuels sont à respecter ailleurs davantage que chez nous.

La magistrature italienne est rapidement intervenue pour réprimer les infractions de droit commun commises, lors de l’assault contre le siège du syndicat CGIL, violences commises sous couvert des légitimes manifestations contre le passe sanitaire à Rome mais à l’initiative de membres déjà identifies de mouvements d’extreme droite infiltrants (et infiltrés?). Depuis lors, au parlement italien, on discute de la dissolution du mouvement “fasciste violent” Forza Nuova, qui se profilait déjà en marge de l’attentat (prétendument commis par les Brigades Rouges) qui fit 80 morts à la gare de Bologne en 1980… l’Histoire pourrait repasser les plats.

Réagir institutionnellement implique que la démocratie et ses trois pouvoirs, (le législatif qui vote les lois, l’exécutif qui donne les moyens de les mettre en oeuvre, et le judiciaire qui les fait respecter) fonctionnent correctement et recueillent ainsi la confiance de la population envers ses institutions.

L’élucidation des grandes affaires criminelles24 dont les auteurs restent à ce jour impunis25 ferait davantage pour restituer cette confiance en perdition que les déclarations et prises de positions politiques, si justifiées qu’elles soient. Toutes les institutions ont le devoir de collaborer afin de mettre au jour ces réseaux qui ont façonné, et façonnent encore, leur Histoire. A défaut, quels arguments pour limiter les actuels 30% de la NVA, descendance du Vlaamse Blok à Anvers, du Font National en France et de partis similaires en Europe ? Et quelle stratégie, lorsqu’ils entreront au gouvernement, comme c’est déjà ouvertement le cas en Hongrie?

Ceux qui en 2000 pensaient qu’un parti comme celui de Haider s’adoucirait une fois intégré dans les rouages démocratiques auraient eu raison si ce parti ne s’appuyait que sur un électorat désabusé, dont les préoccupations ont été trop longtemps négligées. Ils ont eu tort car ce parti est le visage politique d’un capitalisme sauvage et totalitaire au service de ses propres intérêts, ce dont l’Europe a mis trop longtemps à prendre conscience. Depuis le Conseil Européen sur les Affaires Intérieures et de Justice de Tampere (1999), elle s’est rendormie, comme tétanisée, fagocitée de l’intérieur. Il a fallut l’assault contre le Capitole à Washington, le 6 janvier 2021, pour réveiller, en rang plus que dispersé, les Etats de l’Union Européenne.

Avant de mettre point final à cette réflexion, relevons que le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe (2009-2019), Bjorn BERGE de nationalité norvégienne, a fait sa part pour tenter d’enrayer l’hémoragie, avec ces remarquables “Guide” de la Jurisprudence de la Cour de Strasbourg. On ne voudrait voir ces recueils constitués à son initiative dans leurs versions 2018-2020 polluées, par voie de mises à jour par des décisions de juges nommés par des gouvernements affectés des dérives décrites ci-dessus.

N’est-ce pas Eva Joly, norvégienne, juge d’instruction en France puis membre du Parlement Européen qui, dès 2004 dans son ouvrage prémonitoire “Est-ce dans ce Monde là dans lequel nous voulons Vivre”26, observait que depuis l’adhésion de nouveaux membres, de la Mer Noire à la mer du Japon, au Conseil de l’Europe, la défense des droits et libertés à la Cour Européenne de Strasbourg n’était déjà plus ce qu’elle aurait du être.

Rien ne sert de courir, il faut partir à temps …27

Références:

Titre Jean de La Fontaine, La Cigale et la Fourmi.
2 Les droits de l’homme, c’est quoi ?
3 Dossier de l’Express.fr, L’extreme-droite au pouvoir en Autriche.
4 Dossier de l’Express.fr, Cap à droite en Pologne.
5 Le 10 décembre 1948, les 58 États Membres qui constituaient alors l’Assemblée générale des Nations Unies ont adopté la Déclaration universelle des droits de l’homme à Paris au Palais de Chaillot (résolution 217 A (III).
6 La Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et Libertés Fondamentales, plus connue sous le nom de Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) a été ouverte à la signature à Rome le 4 novembre 1950 et est entrée en vigueur le 3 septembre 1953. Elle a été le premier instrument concrétisant et rendant contraignants certains des droits énoncés dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
7 Social Crisis, Political Stalemate, Why did Austria lurch to the right?
8 Fratelli d’Italia, parti italien actuellement à l’opposition. En forte croissance, il a recueilli 20% de l’électorat romain au dernières élections administratives d’octobre 2021.
9 Lega Nord, parti italien qui, après la scission du MSI, en a repris l’orientation. Dans la majorité gouvernementale en 2018-2019, et à nouveau depuis février 2021.
10 Le 21 Octobre 2021, le président du Comité de Suivi des Services de Renseignement, dit Comité R, Serge Lipszyc, s’allarmait de la tolérance dans les administrations belges d’éléments d’extrême droite, alarme qui a fait sortir le Parlement belge de sa torpeur.
11 Austria began to pay the price for a government involving Jörg Haider's far-right Freedom party last night as it faced immediate punitive measures from Europe and beyond.
12 La CJUE a consacré le principe de primauté dans l’arrêt Costa contre Enel du 15 juillet 1964. Dans cet arrêt, la Cour déclare que le droit issu des institutions européennes s’intègre aux systèmes juridiques des États membres qui sont obligés de le respecter. Le droit européen a alors la primauté sur les droits nationaux. Ainsi, si une règle nationale est contraire à une disposition européenne, les autorités des États membres doivent appliquer la disposition européenne. Le droit national n’est ni annulé ni abrogé mais sa force obligatoire est suspendue. La Cour a par la suite précisé que la primauté du droit européen s’applique à tous les actes nationaux, qu’ils aient été adoptés avant ou après l’acte européen concerné. Ce principe garantit une protection uniforme des citoyens par le droit européen assurée sur tout le territoire de l’UE. La primauté du droit européen sur les droits nationaux est absolue. Ainsi, tous les actes européens ayant une force obligatoire en bénéficient, qu’ils soient issus du droit primaire ou du droit dérivé.
13 Mentionons encore le principe de non ingérence dans les affaires intérieures des Etats, qui sur cette base, se voit de plus en plus contesté par celui d’ingérence humanitaire.
14 Poland secured a protocol which clarified how the Charter of Fundamental Rights of the European Union, a part of the Treaty of Lisbon, would interact with national law in their countries limiting the extent that European courts would be able to rule on issues related to the Charter if they are brought to courts in Poland or the UK.
15 La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
16 “David Sassoli, a indiqué mercredi avoir demandé aux services juridiques de l'institution de "préparer une action en justice contre la Commission européenne pour sa non-application du Règlement sur la Conditionnalité". La Pologne n'est pas citée, mais c'est clairement d'elle qu'il s'agit. Cette annonce suit le vote en ce sens, la semaine dernière, de la commission des affaires juridiques du Parlement. La date limite pour que la Commission agisse est fixée au 2 novembre. Si elle ne bouge pas d'ici là, le Parlement l'attaquera devant la Cour de Justice de l'Union européenne”.
17 Greenpass, passe sanitaire, covid save (slave, comme le font remarquer certains à bon droit) ticket, etc.
18 Résolution 2361 (2021), adoptée par l’Assemblée du Conseil de l’Europe avec 102 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention le 27 janvier 2021 : “s'assurer que les citoyens et citoyennes sont informés que la vaccination n'est pas obligatoire et que personne ne subit de pressions politiques, sociales ou autres pour se faire vacciner, s'il ou elle ne souhaite pas le faire personnellement; 7.3.2. de veiller à ce que personne ne soit victime de discrimination pour ne pas avoir été vacciné, en raison de risques potentiels pour la santé ou pour ne pas vouloir se faire vacciner”.
19 Europe rallies against Haider coalition.
20 EU leaders lambast Poland over its challenge to union.
21 “La consécration de la Charte des Droits Fondamentaux, qui n’était à l’origine qu’un message politique des Etats membres de l’Union à l’intention des citoyens européens, s’inscrit à present dans une volonté plus large de l’Union européenne d’assurer le respect de ces droits qui font désormais “partie du droit de l’Union en tant que principes généraux” (articles 6 ; paragraphe 3 TUE). La Charte des droits fondamentaux permet de rassembler plusieurs droits (Convention européenne des droits de l’Homme, Charte sociale européenne…) au sein d’un seul et même texte. Elle s’impose aux organes et institutions de l’UE, mais aussi aux Etats membres lorsqu’ils mettent en oeuvre le droit de l’Union, dans le respect du principe de subsidiarité”.
22 Très actif à l’époque et jusqu’en 2009 en Belgique, le Centre pour l’Egalité des Chances et la Lutte contre le Racisme (CECLR) … a aujourd’hui changé de nom (et d’exigences?).
23 Détruire la confiance, instrument de gouvernance ?
24 En Belgique, ceci implique de progresser dans ces affaires qui concernent directement la gestion du pays: Tueurs du Brabant, affaire Cools, fonctionnaires (et magistrats) et autres détenteurs de pouvoir étatique protecteurs de trafiquants (affaires souvent en relation avec ces mafias de l’Est qui semblent sur le point de prendre le pouvoir en Europe), enfants disparus (qui continuent de disparaitre), toutes affaires de fait en suspend depuis les années 1980-2000 ….
25 Notamment en Italie la capture des “délinquants historiques” ... Dans d’autres Etats européens, ces derniers n’ont pas encore été identifies.
26 Joly Eva et Beccaria Laurent, éd Les Arènes, Paris, 2004.
27 Jean de La Fontaine, Le Lièvre et la Tortue.