« J’aurai l’air arrogant, mais je suis persuadé que celle que je fais est bien de la chanson. La chanson ? C’est celle qui me reconduit à des réminiscences et à des paysages. Comment ? Il m’est possible de les vivre jusqu’au bout, seulement lentement et avec les pieds. Lentement : c’est le mot qu’emploie Nicola Pisu, auteur fidèle aux « représentants de premier ordre », aux « maîtres » qui, comme lui, ont redonné une nouvelle vie aux histoires mineures (et non). Nouvelles histoires qui, sans préméditation aucune, ont transformé les personnes en « personnages ».

En origine considérés amateurs, inconfortables et presque toujours ignorés, très souvent miroirs d’une réalité encore actuelle : ces personnages aujourd’hui ne sont plus seulement des légendes, ou Abracrasta, mais des idées, des concepts donnés à notre quotidien, des sollicitations à la fantaisie et à la créativité. Nicola Pisu le sait bien, si bien qu’il en professe les valeurs et nous les enseigne. Son dernier album, Canzoni sparse, réalisé avec Roberto Corda en 2018, est une narration intense, un survol sur le passé, oui, mais la postulation d’un grand point d’interrogation, aussi. Le présent ? « J’ai du mal à le saisir », il admet. Ainsi, bien qu’il ne veuille se « perdre dans les méandres de la vie humaine », courageusement (inconsciemment ?) il le fait. Il accepte, côtoie ses propres peurs, établit un pacte avec le méconnu. Il joue avec le contrat le moins garanti : la passion. Passion pour l’art et pour la vérité de l’art, pour l’esthétique des mots et pour la recherche (non d’un sens forcément, mais d’un résultat qui ait du sens). Les légendes servent-elles à déchiffrer la réalité ? Nous n’en sommes pas surs, ce n’est pas mathématique. Ce que toutefois nous savons, c’est qu’elles peuvent nous aider, nous, à le faire indépendamment. Canzoni sparse est un hymne à la vie avancée, au cercle des séquences perpétuelles de jours passés et de jours à venir, le témoignage d’histoires inoxydables, presque toujours d’origine populaire, racontées en principe dans les petits villages et devenues, ensuite, clés de lectures universelles. C’est un jeu, aussi. Un parcours aventureux dans le dédale de la parole qui nait dans les « fermes de poulets » et parmi « les rochers ». Un jeu qui devient écriture à son état primordial, en pureté. Écriture en pureté qui, comme les nuages, est naufrage. Témoignage, voyage, immortalité. Qui limite, miraculeusement convoie la technique, à être ce que l’artiste de la chanson définit « valise des outils ».

Vous êtes défini « auteur-compositeur » d’origine classique. Comment expliquez-vous cette acception, « d’origine classique » ?

J’essaye de répondre en espérant de ne pas me perdre dans les méandres du sujet, si ample et complexe. Malgré que je ne sois un érudit ou un critique du secteur, je peux dire que par « auteur-compositeur », terminologie apparue autour des années 1960, on entend définir ceux qui écrivent et interprètent leurs propres chansons, avec, en plus, certaines caractéristiques inhérentes de forme et de contenu. Cela ne signifie pas qu’à l’intérieur de l’ensemble « chanson à texte » il y ait seulement des expressions stylistiquement semblables, au contraire, il suffit de penser aux représentants majeurs, maitres ignares des générations futures qu’ils auraient formées artistiquement : de De André à Guccini, de De Gregori à Dalla, de Vecchioni à Fossati, Lolli, Bubola, Testa, jusqu’aux divers Capossela, Manfredi, Consoli, Malaspina…

Je crois bien que ce soient eux les références précises de l’ « origine classique », maintenue jusqu’à nos jours mais mise à jour, du moins en Italie, puisqu’il suffit de porter le regard au-delà des Alpes pour apercevoir les figures de Dylan, Cohen, Brassens, Brel, Baez, Smith, Cave, Waits, ecc. Je suis persuadé que la chanson ne soit pas un genre musical, mais malgré mes efforts destinés à trouver des définitions alternatives, je n’en trouve pas : nous n’arriverons jamais à la renfermer dans une cage, à l’étiqueter.

Il faudrait une sorte de tribunal formé par des critiques musicaux pour pouvoir juger ce qu’est effectivement la chanson et ce qui ne l’est pas. Mais au-delà du jugement des différences, pour lequel je n’ai pas les justes compétences, si j’ai commencé à écrire des chansons c’est grâce à un grand nombre de ces auteurs-compositeurs cités. Comme prévu, extension et subjectivité du sujet traité ont fait que cet interprète amateur (moi) se soit perdu dans les méandres des possibles définitions et considérations.

Votre parcours artistique débute il y a de nombreuses années. Comment s’est-il évolué au fil des années, quels choix remerciez-vous et quels autres vous regrettez ?

Je suis né et je vis encore aujourd’hui dans une petite ville de province du Sud de la Sardaigne. Je joue de la guitare et j’écris depuis mon plus jeune âge et, après avoir fait de nombreuses expériences musicales, je me suis retrouvé à approfondir le domaine de la chanson, jusqu’à ce que j’en devienne complètement dépendant. Pendant ce temps, je me suis diplômé en ingénierie civile, activité qui, différemment de la musique, me permet de survivre. La littérature a souvent inspiré mes chansons, mais elle a surtout favorisé un certain affinage des techniques, de la « valise des outils », provoquant en moi le déclenchement d’un processus de soin dans le choix de la parole. Mon premier travail discographique remonte à l’année 2008, Abacrasta e dintorni, librement inspiré à deux œuvres de Salvatore Niffoi, derrière lequel en ont suivi quatre. Au fur et à mesure du chemin, j’ai pu faire des rencontres importantes pour ma croissance artistique et personnelle, à partir de celle avec Andrea Gallo. Mon cinquième album m’a permis de faire le bilan et de comprendre où j’en suis avec cette idée d’être devenu un auteur-compositeur, mais je ne suis pas sûr d’y être arrivé. Je n’ai pas fait de choix particuliers, quelques trains ont été perdus, c’est sûr, mais je sais aussi que pour tous les trains perdus et encore à perdre, il y a eu et il y aura un grand nombre de paysages qui seulement lentement et grâce aux pieds, à mes pieds, je pourrai admirer.

Lors d’une interview précédente, vous annoncez que le morceau Del tempo parle de vous, enfant, né et grandi dans le Campidano. Quel rôle ont eu et ont encore vos origines pour votre écriture ?

Les origines et l’histoire personnelle de chacun représentent ce que nous sommes aujourd’hui et pour ceux qui écrivent, elles constituent un grand et important patrimoine dans lequel pouvoir piocher. Del tempo je l’écrivit dans les premières années 2000, puis j’y ai fait retour : les vers sont, en fait, des pages de mon journal intime, ils racontent qui j’étais, enfant. Au fur et à mesure que les années passent, je sens mes souvenirs de plus en plus sur la peau, malgré qu’ils soient souvent imprécis. Le morceau dessine un monde vu avec les couleurs de l’âme ingénue, jeune, traduisant en vers les réminiscences nébuleuses qui dessinent visages inexacts, maintenant adultes. Ce passé n’existe presque plus désormais et, en voulant citer Guccini, à présent je le vois comme si la lumière était en train de s’éteindre mais il ne fait pas encore complètement nuit. Mes racines demeurent dans cette petite ville, avec ses grandes figures saintes et ses roches laviques, le vent qui annonce l’orage, le vendeur abusif de poulets, les toiles d’araignées entre les rayons de roue du vélo. Mon écriture nait ici.

Que signifie, pour vous, le verbe « répandre » ? (Canzoni sparse, de l’italien : chansons répandues)

Avec un peu de saine présomption, je réponds que « répandre » signifie verser plus ou moins uniformément en différents point, ici et là. Et ce n’était pas tout à fait le cas des chansons qui devaient rentrer (sont entrées) à faire partir du jeu de Canzoni sparse. L’ambiguïté sémantique, le jeu de mots a inspiré le titre de ce cinquième travail discographique, c’est tout. Il n’a, en aucun cas, voulu lui ressembler, seulement le citer : le sonnet qui ouvre le Canzoniere di Petrarca (de l’italien, Chansonnier de Petrarca). Un jeu de mots qui m’a paru, finalement, très fonctionnel pour raconter et promouvoir cet album.

Vous êtes surnommé « habitué de la page blanche ». Quelle signifie le geste de l’écriture dans votre opération créative ?

Alors que dans le passé j’écrivais énormément, aujourd’hui je ne le fais que méticuleusement et souvent je vis d’expédients, puisque je réécris chansons qui, vingt ans auparavant, je trouvais belles et finies mais qui, en réalité, ne l’étaient pas du tout. Quoi qu’il arrive, je ne suis pas un « habitué de la page blanche », plutôt des pages noircies par les notes, par les couplets isolés, les essais très courts en prose et les lignes mélodiques encore à développer. Malgré que je sois parfaitement conscient de leur importance pour la réussite d’un morceau, j’ai toujours soutenu que mélodie et arrangements viennent en seconde place, après le texte. Alors que pour la part de l’auteur il faut la juste inspiration (qui vient quand elle veut) et l’étude, pour celle du compositeur la mélodie musicale soutient le texte et le compositeur nécessite donc d’inspiration (qui vient quand elle veut) et de technique ; mais il est possible d’intervenir, là, efficacement par les arrangements, qui, si faits par un bon musicien, colorent, embellissent l’architecture d’un morceau.

Pour revenir à la question, j’écris quand j’ai quelque chose à dire, à communiquer, quand je sens l’urgence ou quand l’inspiration (qui vient quand elle veut) me plaque au mur. J’ai la chance d’écrire souvent en même temps texte et musique, mais il est vrai que l’attention majeure, néanmoins, est accordée aux mots. Parfois, je me sers de rimes, je joue avec les symétries et les enchaînements de vers et cela me permet d’exprimer ce que je voulais, tandis que d’autres fois il est plus difficile de suivre une forme précise, qui encage.

Dix ans de musique, dix ans de Canzoni sparse. Dix ans enveloppés dans cet album. Vous-même suggérez : « Plus qu’une faible, ridicule célébration du moi, dix ans après la sortie du premier album, Canzoni sparse représente un « point zéro », duquel repartir ou par lequel s’arrêter définitivement. C’est un point zéro de départ ou bien d’arrêt, avez-vous réussi à le comprendre ?

Je n’y suis pas du tout arrivé et, au contraire, les doutes sont augmentés : avec Canzoni sparse j’ai seulement ré-enroulé la bobine, sans comprendre grand-chose de ce qui a été fait jusqu’ici et de ce que je veux faire ensuite. J’aurai, encore une fois, l’air arrogant mais je suis persuadé que celle que je fais est bien de la chanson. Les chansons ont reçu un certain nombre d’appréciations de la part des critiques, néanmoins pas des critiques commerciaux, ce qui me relègue à une « niche ». En ce pli du secteur (quelle horrible définition !) je ne suis cependant pas seul, bien au contraire. Il y a d’excellents auteurs-compositeurs surement plus forts que moi, ignorés et sous-évalués.

Pour paraphraser Pasolini, je produis des chansons, lesquelles ne sont pas consommables, et ceci fait qu’elles ne peuvent être définies comme étant une marchandise. Bien heureusement j’ai un plan B pour me soutenir économiquement, ce qui me permet de suivre mon objectif dans la musique sans pour autant mourir de faim.

Vos titres sont curieux. Ils renvoient en toute évidence à la chanson d’un temps, à sa connotation populaire. Y a-t-il une connexion entre les personnages choisis, un fil rouge qui les unit ? Qu’est-ce qui les conduit, quelle symbologie, morale s’il y a, résument-elles ?

Si je travaille avec attention à mes textes et à mes chansons, pour ce qui en est des titres, au contraire, j’ai une approche bien plus hâtive. Les critères sont variés, mais souvent le choix dépend de leur (efficace ou non) description de ce qui est dit dans la chanson même. Parfois le titre est là, dès le début, comme une ancre sur les fonds marins. D’autres fois, avant de le choisir, j’en écris deux pour m’en souvenir, en repoussant le moment du choix définitif. Pour ce qui en est de la morale, je préfère que ce soit le public à la trouver. Souvent mes personnages me ressemblent, mais j’essaye le plus que je peux de laisser ma pensée aux marges de mes chansons. C’est tout à fait vrai, comme soutenait Pirandello, qu’eux, les personnages, tendent à posséder la scène narrative tout en devant batailler contre l’intromission de l’auteur afin de protéger leur espace autonome. Il m’est arrivé de me battre avec certains personnages de fantaisie, horribles même, avec qui je ne partage rien. Néanmoins, quand j’écris des textes autobiographiques, j’essaye de les masquer et de les embellir avec de nombreuses métaphores, souvent baroques, qui puissent rendre le personnage (qui cette fois coïncide avec l’auteur), non reconnaissable.

Dans Abacrasta, vous vous refaites à la Légende de Redenta Tiria (Leggenda di Redenta Tiria ; en italien, ndr), légende qui a comme protagoniste Abacrasta même, une ville invisible où l’on meurt, bien sûr, mais jamais de vieillesse. Pouvez-vous nous la raconter ?

Un jour, en avril 2007, Salvatore Niffoi, écrivain Premio Campiello en 2006, m’appela pour me remercier et me complimenter pour avoir écrit la chanson Abacrasta, que je pris de son roman, la Leggenda di Redenta Tiria. Il était surpris par ma capacité de synthèse et par les atmosphères que j’avais créés. Quelques temps après, encouragé par certains de mes amis, je participai à une présentation de son livre et, énormément gêné, je me présentai à l’écrivain. On discuta de son livre et il me suggéra de réaliser un concept album, inspiré de son œuvre. L’idée me plut et en 2008 je publiai le travail de Abracrasta e dintorni, librement inspiré de La Leggenda di Redenta Tiria et de Il viaggio degli inganni (en français Voyage des pièges. Les histoires de Abacrasta et Oropische, villes imaginaires de l’œuvre imagée niffoienne (de Niffoi), se mélangent librement à l’intérieur de l’album. Il y a ce fil conducteur omniprésent : une réalité inquiétante. « Tous les hommes, à un certain âge, dénouent leur ceinture et se l’enroulent autour du cou. Les femmes, elles, utilisent la corde ». Seulement certaines de ces personnes se sauvent, grâce à la rencontre avec Redenta Tiria, une femme aveugle, aux pieds nus et aux cheveux noirs. Cette femme coupe la langue à cette voix qui leur dit de mourir, de se tuer : c’est une allégorie de l’espoir. Dans mon album, ayant mélangé les personnages à d’autre noms et lieux imaginaires des alentours de Abacrasta, s’insinue également une histoire d’amour entre un jeune anarchique (c’est ainsi que je l’ai représenté) et une bonne sœur ; soit le cri de la misère, de la dignité et de l’orgueil féminin.

Dans vos morceaux vous affrontez un thème inoxydable, très important et, malheureusement, aujourd’hui encore de grande actualité : la violence. Y a-t-il quelque chose que la musique fait pour pallier le problème de la violence ? Les artistes ont-ils, oui ou non, un rôle (de dissidence) à assumer au sein de cette bataille ?

Pour ce qui en est de la violence structurée, la guerre, en ayant été pendant plus de quinze ans au sein de l’organisation humaine Emergency, j’ai les idées plutôt claires : elle ne produit que la mort, des blessés et de la destruction, là où l’ennemi qui perd le coup est presque toujours un civil (et souvent avec une couche et une sucette !). Je crois que les artistes ont un rôle important, qui est de faire réfléchir les gens à certains sujets, d’y pointer dessus les réflecteurs. Pas souvent par contre le message est entendu et il arrive parfois qu’il soit utilisé comme il convient. Je fais un exemple : un homme maltraitant avec trop de pouvoir glorifiait un pécheur avec « un solco lungo il viso che spezza il pane e versa il vino » (un pli le long du visage qui partage le pain et verse le vin ; en français, ndr) tout en imposant, en même temps, la fermeture des ports en laissant des centaines de personnes à la dérive (in balia del mare). Voilà, je suis convaincu que les chansons soient un instrument important de communication et de narration de l’époque dans laquelle nous nous trouvons, mais, en fin de compte, ce ne sera pas avec les chansons que nous changerons le monde. Pour pouvoir changer les choses, il faut faire, l’art ne suffit pas ; ce n’est pas donc pas pour l’art qu’un artiste engagé doit renoncer à son rôle anthropologique et sociologique, autrement il ne nous resterait que des chansons, de refrains à danser sous le soleil de l’été !

Nel cielo sia (en français, Dans le ciel soit) nait grâce à l’œuvre de Marcello Fois Quasi grazia. Pourquoi ce choix ? Existe-t-il une synergie entre littérature et chanson, un rapport conscient entre ce qu’un auteur-compositeur-interprète lit et ce qu’il écrit ?

Le texte de la chanson se concentre sur le dialogue imaginaire entre Grazia Deledda et sa propre mère, né de l’écriture de Marcello Fois. Grazia Deledda, le sujet de la chanson, était une écrivaine incroyable et avec un très grand talent, qui, d’une façon extraordinaire, a peint les aigres paysages de la Sardaigne entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle. Successivement, je me suis inspiré également de Savina Dolores Massa, Álvaro Mutis, Giuseppe Dessì, Italo Calvino et, justement, Marcello Fois. Pour les chansons à venir, encore inédites, je fais référence aux écrits de Gabriel García Márquez, Edgar Lee Masters, Louis-Ferdinand Céline et Salvatore Satta, plus quelques autres poètes. Enfin, je ne le fais que par amour de la littérature et de la poésie. Je ne crois pas que le rapport entre ce que je lis et ce que j’écris soit conscient, mais ce qui est sûr est que, si je suis aujourd’hui un auteur de chansons, je le dois à ce que, le long de ma vie, j’ai lu et vécu.

Les légendes, les histoires traditionnelles servent à déchiffrer le monde d’aujourd’hui ?

Les légendes fascinent, c’est sûr. Elles ne sont pas toujours utiles à déchiffrer le monde, au contraire, parfois elles nous en éloignent. Mais la beauté de l’histoire reste, à priori. Quand nous racontons, nous suspendons le temps et cela est plutôt utile, en soi. Et puis, il faut si peu pour faire semblant que les histoires soient bel et bien des histoires vraies ! Au moins pour le temps d’écoute, de lecture. Cela vaut pour les livres, pour les chansons, comme pour le théâtre. Je crois que, par exemple, lire certains écrit de Márquez ou de Calvino ne peut que nous faire du bien, vraies ou imaginaires qu’elles soient. L’absurdité de certaines histoires nous permet souvent d’y trouver quelques traces utiles pour déchiffrer notre présent. Et il en est de même pour les histoires racontées aux enfants, qui, en plus de faciliter la rencontre humaine, stimulent la fantaisie et la créativité. Personnellement, cela fait plus de quarante ans que je réfléchis au triste sort de Cendrillon.

« Je suis certain que même si je décidais d’arrêter avec les chansons, ce seraient elles qui reviendraient me chercher par les cheveux ! », vous écriviez. C’est donc la musique qui appelle l’artiste ? Ou bien c’est l’artiste qui se sert de la musique pour s’exprimer ? En d’autres termes : c’est la musique qui choisit l’homme, ou l’homme la musique ?

Question très compliquée pour laquelle je n’ai pas de réponses vraisemblablement justes. Je crois qu’il y a différentes possibilités et l’une d’entre elles est que la musique, surtout dernièrement, ne demande pas à ce que l’on ait un talent. Parfois, il peut s’agir de technique. Parfois il n’y a même pas de technique. L’écriture de chansons est par contre souvent une urgence, un procès inévitable. C’est l’exigence primaire de l’être humain : communiquer, exprimer (s’exprimer). Écrire des chansons, comme écrire l’histoire a permis à l’espèce humaine d’évoluer. Le fait est que, quoi qu’on en dise, il y a des chansons de valeur et d’autres qui le sont moins.

Personnellement (et je vous avais prévenu, je n’ai aucune réponse logique), je n’ai jamais choisi d’écrire en musique, mais c’est devenu mon vice préféré. Et maintenant ? Je suis là, les tiroirs pleins de rêves, de doutes et (encore) de chansons.