La Galerie Laure Roynette présente à partir du 5 février 2015 les oeuvres récentes de François Fries dans sa première exposition personnelle à la galerie «Que vois-tu du Mont Fuji ?»

«Ce que je fais m’apprend ce que je cherche». Cette phrase de Pierre Soulages, que François Fries cita un jour lors d’un entretien pourrait résumer -s’il le fallait- toutes les heures passées depuis bientôt dix ans par l’artiste dans ses ateliers successifs. Car en peignant, François Fries, inlassablement, cherche. Pourquoi y a t-il quelque chose et pas plutôt rien ? Mais toute métaphysique et méditative qu’elle puisse être, la question s’enracine chez François Fries dans toute son emprise réelle, dans l’affrontement que le peintre connaît bien, avec la toile, la matière, physique. Car c’est dans le faire («ce que je fais...») que sa recherche nait, s’épanouit, s’exécute sans jamais s’achever ni se dissoudre. François Fries cherche, sait-il seulement quoi?

Une quête personnelle, donc, une sorte de mantra, qui finit par se passer du discursif. On le sait, François Fries aime la fiction: celle que produit le cinéma -son autre territoire-, auquel il se réfère souvent pour parler de «manières de faire» mais aussi pour installer l’atmosphère d’une série qu’il commence. Les titres de ses oeuvres, souvent, étonnent, par leur dimension fictionnelle au regard de ce que montre la toile. Mais raconter ou se raconter une histoire, l’histoire d’un train traversant à toute vitesse un paysage dont, passager, on ne retiendrait qu’une fugitive image, ou l’errance d’un touriste dans un musée, les yeux glissant de toile en toile, sans vraiment en regarder aucune, conservant dans sa mémoire quelques bribes, souvenirs fugitifs de formes et de couleurs, ou encore imaginer la manière dont «tout s’écoule, même les montagnes»... Tout cela n’est peut-être qu’artefact d’un phénomène rendant les mots provisoirement obsolètes. Je fais, je peins, et en peignant, les mots se dissolvent.

On pense à ce mot de Harold Rosenberg, à propos de l’ « action painting », qui pourrait, d’une certaine manière, s’appliquer au travail de François Fries, pour qui, sans aucun doute, la toile restera toujours cette « arène dans laquelle agir » dont parlait le critique américain, cet espace auquel toujours se confronter, et dont le résultat, la peinture, ne sera jamais un « produit fini » mais une pratique complexe, nécessaire et toujours « in progress »...

Marie Deparis-Yafil
Décembre 2014