Il est très tendance, dans les discours tenus dans certains cercles féministes que l’on pourrait qualifier de radicaux, de stigmatiser l’imaginaire érotique féminin en affirmant qu’il est le poids de millénaires de patriarcat et qu’il enchaîne les femmes au désir de domination des hommes. Qu’en est-il vraiment ?

C’est très facile d’accuser les femmes qui osent revendiquer le droit à leurs envies, désirs et fantasmes de nourrir le masculinisme et ce qu’on appelle de façon générale « l’esclavage des femmes », de vilipender la sexualité phallocentrique – comprendre « axée sur la pénétration » – qui serait imposée aux pauvres femmes qui n’ont pas besoin d’elle, puisqu’elles ont un clitoris qui suffit à les faire jouir. À noter que pour ces accusatrices, le clitoris n’est évoqué qu’en tant qu’organe externe puisqu’elles font totalement abstraction de sa globalité majoritairement interne. Pour peu, elles pourraient même prétendre que les hommes ont inventé cette partie interne pour justifier leurs pénétrations barbares. Tant que nous sommes dans le ridicule, allons-y franco!

Or, les femmes ne sont pas de pauvres êtres qui ne peuvent être comblés – sexuellement parlant -- que par de grands sentiments sirupeux et beaucoup de douceur… Si l’on va même plus loin, on peut même affirmer que les cantonner à cela est insultant et privatif de leur liberté de désir et de plaisir.

Peut-on revendiquer vouloir servir la cause des femmes en leur déniant tout désir et tout fantasme, parce qu’au final, c’est quand même ce qui résulte de telles affirmations qui accusent celles qui osent afficher leurs désirs et leur liberté d’y accéder, d’être les complices d’esclavage sexuel. Une femme libre devrait donc attendre sagement et taire ses envies? Cela peut paraître schématique, mais c’est tout à fait cela en fait. Et ce n’est pas loin de rejoindre les théories machistes qui dénient aux femmes le droit de s’approprier leur propre sexualité. Ce qu’il fallait démontrer! Les extrêmes semblent bien se rejoindre!

Pourquoi me sens-je aussi concernée en fait? Tout simplement parce que je suis auteur érotique et que j’ai toujours revendiqué que les textes que j’écris ont pour but – outre celui de divertir – de montrer des femmes qui s’épanouissent en s’autorisant à accepter leurs envies les plus inavouables, de leur dire qu’elles n’ont pas à en ressentir de culpabilité. Et dans ce sens, je me considère donc comme féministe, au plus noble sens de ce terme. Au travers de ces attaques outrancières visant les femmes libres dans leur sexualité, ce sont toutes les femmes qui sont insultées. Et que l’on ne vienne pas parler de syndrome de Stockholm, cet argument est par trop souvent évoqué dans certains discours féministes radicaux pour expliquer l’entêtement des femmes à défendre leurs droits à une sexualité libérée.

Oui être féministe aujourd’hui, cela devrait consister à défendre le droit, pour chaque femme, de vivre et mener sa sexualité comme elle l’entend, sans aucune arrière-pensée. Et je ne cesserai de revendiquer que ce soit par cela – pas seulement, mais aussi – que passe la libération des femmes visant à atteindre une égalité avec les hommes. Prétendre le contraire, c’est définitivement pour moi l’asservissement assuré.

Que vive la diversité de désirs, de plaisirs pour toutes les femmes. Qu’elles osent les assumer et s’exprimer en toute liberté. Oui, certains de leurs fantasmes peuvent être socialement incorrects, et alors? Est-ce si grave ? Ce sont les leurs et elles en ont le droit! C’est là, la clé d’une vie épanouie et heureuse. Le dénier revient à jeter une burqa mentale sur l’éros féminin, sous prétexte de bien-pensance. À chacune de trouver ce qui lui convient le mieux, loin des jugements moraux ou sociétaux.

À l’heure où nos sociétés érigent l’égalité homme-femme en grande cause, pourquoi y aurait-il une exception pour la sexualité des femmes?